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Texte 4 sur le thème de la magie pour le 3e hors série de la revue

Publié le par christine brunet /aloys

 

L’épée de Velkan



 

Il y a bien longtemps, dans un lointain royaume…

 

À l’extérieur du palais d’orichalque, qui dominait la ville portuaire en contrebas, acclamations et applaudissements nourris croissaient – Démodion, le premier fils du roi Timéo et de la reine Liliane, souverains d’Allégia, venait de naître.

De mémoire humaine, comme non humaine, on n’avait encore jamais vu un aussi joli bébé. Un présent de la déesse Rozomorfia, assurément – la déesse à la peau couleur framboise, translucide, et protectrice des braves depuis la nuit des temps.

Puis l’accoucheur royal sortit leur second fils – Velkan serait le cadet. Il était tout aussi beau que son frère, sinon plus, et semblait déjà on ne peut plus vigoureux.

Le soir, et toute la nuit durant, des feux d’artifice éclairèrent le ciel d’incroyables bouquets d’étoiles multicolores.

Même le grand dragon Prasinos, l’oracle respecté de tous, se déplaça. Il quitta exceptionnellement son refuge, lequel dominait la Montagne des anciens dieux, dans le Nord. Pour y accéder, une ascension de plus de neuf-cents mètres sur l’adret, grâce aux larges marches polies d’un escalier, taillées dans la roche, était nécessaire. L’ubac de la montagne, lui, était l’endroit où vivait le pacifique peuple des lutins, bâtisseurs de génie aux doigts habiles et grands amateurs d’énigmes et de charades.

Lové sur le dôme du palais, Prasinos, presque aussi vieux que la déesse Rozomorfia, rassurait le peuple et le couple royal par sa seule présence majestueuse.

Il faut dire que…

Quelques mois auparavant, dans une grotte, Timéo et ses gardes réussirent à piéger Cattus Khan, le terrible nécromancien qui terrorisait la planète tout entière depuis le règne de l’arrière-grand-père de Timéo. Là, au terme d’un long combat de magie blanche contre magie noire, Rozomorfia enferma son esprit perverti dans une pierre de sang, profondément enfouie, un peu plus tard, dans les Ruines du Vampire, dans la région tropicale de la planète. Quant à son corps, il fut incinéré.

Certains des pires généraux de Cattus Khan demeuraient toutefois en cavale… Parmi eux : le puissant Ken-Do, qui maniait admirablement le sabre, et l’impitoyable Glaciarr. Glaciarr, de son vrai nom Glade Odegård, était autrefois le vaillant capitaine de la garde royale d’Allégia. Il fut capturé par le nécromancien, asservi magiquement, puis transformé en mutant capable de contrôler eau, glace et vent.

Ce soir, soucis et malheurs semblaient n’avoir jamais existé…

Et les deux jeunes princes grandirent…

Ils reçurent le même amour, le même enseignement, mais l’un : Velkan, était naturellement vertueux, adoré de tous, et l’autre : Démodion, naturellement sournois. Un mal sommeillait dans son cœur et dans ses veines, et la beauté de son visage n’était qu’un masque. Son âme était laide. Aliénée.

Prasinos mit en garde le roi : son fils aîné les trahirait un jour, mais Timéo se braqua. Il savait… Tous, ils savaient. Mais la connaissance et l’acceptation sont deux choses différentes. Surtout quand il s’agit de la famille.

Un an plus tard, Démodion fut surpris par leur maîtresse d’armes en train de conspirer avec la sorcière Jynx, ancienne élève de Cattus Khan, inféodée à son culte. Démodion, pour préserver son secret, tenta de tuer leur professeure d’un coup de glaive en plein cœur, mais son frère l’en empêcha. Ce jour-là, en effet, Velkan, perturbé par son rêve de la nuit passée, l’avait discrètement suivi… Il s’empara de l’épée et, d’un coup malheureux, défigura son frère qui s’écroula à ses pieds en vociférant.

Jynx usa d’un sort de disparition, emportant Démodion avec elle dans un tourbillon de fumée. Ils se réfugièrent dans la région la plus sombre et la plus désolée d’Allégia, où parias et criminels vivaient depuis la chute du cruel nécromancien.

Des semaines s’écoulèrent – le roi et la reine, horrifiés par le récit de Velkan et de Kyniga, la maîtresse d’armes, avaient proclamé la mort de leur aîné. Un « tragique accident ». Cette version, jugèrent-ils, était préférable pour les Allégiens.

Le fiel de Démodion grandit, et grandit encore…

Une nuit, attiré par une voix dans sa tête, il se leva subrepticement et se dirigea vers ce lieu sinistre connu sous le nom des Ruines du Vampire. Il marcha peut-être trois heures avant de voir apparaître l’ancien sanctuaire, théâtre de sacrifices rituels.

À l’intérieur, alors qu’il scrutait la statue d’un ancien despote : Desmobat, la terre s’ouvrit sous ses pieds, et Démodion disparut… Il réapparut quelques minutes plus tard, en lévitation, tout nimbé d’un éclat funeste. Dans sa main, une pierre – la pierre de sang où la déesse Rozomorfia avait enfermé l’esprit de Cattus Khan.

L’esprit du nécromancien prit alors possession du déjà perfide Démodion. En réalité, il fusionna avec lui… Démodion hurla de douleur et tomba à genoux. Quelques minutes plus tard, il se releva, totalement métamorphosé… Il n’était plus le prince déchu d’Allégia… Il était Nécrodion, le nouveau maître des ténèbres !

Infatué de sa puissance magique, il détruisit la statue de Desmobat et transforma les ruines en forteresse. Sa forteresse. Plus tard, il réunit la sorcière Jynx, Ken-Do, Glaciarr et quelques autres, et réfléchit à sa vengeance contre Velkan.

– Il te faudra plus qu’une épée et de la chance pour me battre, cette fois, mon frère… ricana-t-il. Car je détiens tous les pouvoirs de Cattus Khan ! Et tu mourras !

Ainsi, l’odyssée de Velkan n’allait pas tarder à lui être révélée… Et que signifiait son dernier rêve ? La belle déesse Rozomorfia et son glaive ne faisaient plus qu’un.

Mais ceci, braves gens, est une autre histoire…

 

Publié dans concours

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Pour le 3e Hors Série de la revue, sur le thème de la magie, Texte 3

Publié le par christine brunet /aloys

 

ET S'IL SUFFISAIT D'UN SORT ?

 

Je regardais Paul et Lionel, les jumeaux de mon frère aîné, et Léa, la fille de mon autre frère, se préparer pour la fête. Ils enfilaient leur déguisement de fantômes puis venaient près de moi pour que je maquille de noir leurs yeux et leurs lèvres. Depuis plusieurs jours déjà, ils aspiraient à passer de porte en porte pour récolter quelques bonbons. Ils étaient aussi ravis de passer trois jours chez leur grand-mère qui pour l'occasion avait décoré la terrasse et l'intérieur de sa villa avec des potirons. Quant à moi, adolescente de seize ans, cela m'amusait de les accompagner dans cette espèce de folie ! Cela ne nous ferait-il pas de magnifiques souvenirs communs ?

Ce trente-et-un octobre, en fin d'après-midi, nous marchions tous quatre d'un bon pas. C'était un jour  habité par la magie et le merveilleux de l'enfance. J'avais établi notre itinéraire et nous rejoignions d'abord le coin le plus éloigné du quartier. Nous venions de franchir la barrière d'une  maison de briques rouges entourée d'un jardin mal entretenu. Mes trois neveux étaient allés sonner à la porte. C'est une vieille dame à l'apparence de sorcière qui ouvrit. Grande, voûtée, le visage ridé, le nez crochu, les cheveux gris en bataille, des verrues sur le menton et le front, elle était vêtue d'une robe noire et d'un tablier gris foncé. Les enfants dirent en chœur : "Un bonbon ou un sort !". 

La vieille répondit d'un ton las, pas vraiment méchant : "Oh les enfants fichez moi la paix !" Les enfants reprirent cependant : "Un bonbon ou un sort !". Et la vieille enchaîna avec mauvaise humeur : "Si vous ne partez pas immédiatement, ce sera moi qui vous jetterai un sort…" Léa revint tremblante vers moi, mais les deux garçons insistèrent : "Un bonbon ou un sort !"

"Vous n'avez pas compris qu'il ne fallait pas m'embêter ?", questionna-t-elle. Les gamins restèrent tétanisés, car elle se redressa un peu, pointa l'index vers eux et lança de sa voix éraillée : "Vous ne comprenez pas le français, on dirait. Alors vous l'aurez voulu, ce sera un sort." Elle bredouilla quelque chose d'incompréhensible, se mit à rire de façon sarcastique laissant voir des dents brunes puis ferma la porte. Mes deux neveux demeurèrent un instant encore comme paralysés avant de faire demi-tour. Il faut reconnaître que ça démarrait mal. 

Les enfants me retrouvèrent sans prononcer le moindre mot. Au bout de quelques dizaines de mètres, ils  renouèrent avec leur entrain, allèrent sonner à la porte d'une autre maison où on leur offrit des biscuits. L'incident semblait oublié et le panier se remplit peu à peu de friandises. Je ne pensais bientôt plus à notre première expérience. De retour chez Maman, la soirée se passa dans la gaieté. Les enfants examinèrent leur récolte et manifestèrent leur exaltation en sautant et en poussant des cris de joie. Maman, amusée par leur spontanéité, prit quelques photos avant qu'ils ne quittent leur déguisement. 

Le soir, avant de me coucher, j’ouvris la fenêtre de ma chambre pour aérer un peu et j'examinai la lune. Elle était presque pleine ! Je songeai aussitôt aux loups-garous. J'évoquai malgré moi la vieille dame et une angoisse affleura en moi. Quel était ce sort lancé aux jumeaux ? 

Le lendemain, sept heures trente sonnèrent. Je me levai, me rendit à la salle de bains pour une douche rapide et m'habillai. Je ne me sentais pas fringante comme je l'étais d’habitude. J'avais rêvé de la mégère qui avait rabroué mes neveux. Dans mon songe, je l'avais vue adresser des maléfices à tout-va et j'en éprouvais un malaise. Je gagnai la cuisine. Je ne savais que faire, mon cœur battait la chamade et mon cerveau encombré par ma préoccupation secrète était inefficace. Maman s’affairait pour la préparation du petit déjeuner et je l'aidais machinalement. J'allai réveiller les enfants. Après s'être lavés les mains et débarbouillés le visage, ils vinrent s'installer à table.  La toilette ce serait pour plus tard. Je remarquai immédiatement que Paul et Lionel avaient le visage et les mains couverts de verrues ! Ce fut Léa qui en fit la remarque. "Hé vous avez des boutons …" "C'est bizarre ! C'est la sorcière ?", continua-t-elle. Je me tus, mais je comprenais évidemment sa réaction. 

"Comment ça, la sorcière ?", réagit ma mère. Je répondis vite avant que les enfants ne puissent donner des détails : "Oui, hier on a rencontré une étrange dame au bout de la rue Jaurès et pourtant, il est sûr qu'elle ne fêtait pas Halloween." Je n'avouai pas que comme Léa j'avais pensé à cette femme. Une idée me torturait : Que pouvais-je faire pour aider les gamins à retrouver leur beau visage ? Les jumeaux ne risquaient-ils pas de se transformer peu à peu en sorciers ? 

"Ça ne semble pas grave. Il faudra juste montrer ces éruptions au docteur", dit ma mère. "Pouah, le docteur !", répondit Paul. "Il suffira presque certainement d'une pommade", conclut Maman.

 Le temps passa. Rien ne pressait. Maman avait adroitement banalisé les problèmes de peau. Le premier novembre était jour de congé. Je rangeai avec Maman, Léa fit sa toilette, les garçons jouèrent sur leur tablette, mais j'entendis des commentaires de Paul qui s'inquiétait à propos de ces petites excroissances tandis que Lionel tranchait "Mamy dit que ce n'est pas grave. On a dû manger trop de bonbons." Comme prévu, nous allâmes marcher. Pour moi tout semblait si compliqué ! Je cogitais sans fin et conclus qu'un sort ça se défaisait… Et l'idée finit par jaillir. L'après-midi, je pris à la cave trois chrysanthèmes de couleurs vives parmi tous ceux que Maman se préparait à aller déposer le lendemain sur la tombe de Papa. Je fis un bouquet et je proposai aux enfants de réparer leur insolence. Ce fut Paul qui accepta de s'y coller à condition qu'on  joue d'abord la scène entre nous. Un semblant de répétition eut lieu dans ma chambre. 

Retour rue Jaurès. Coup de sonnette. "Madame, excusez-nous pour hier", dit Paul en tendant les fleurs. "C'est bien ça, fiston, de  reconnaître ses torts. Et l'autre, il ne s'excuse pas ?",  fit-elle en désignant Lionel de la main. Je poussai Lionel dans le dos. Il s'exécuta aussi. "C'est bien, c'est léger, mais c'est mieux que rien …". Alors la femme pointa l'index vers eux et marmonna quelque chose d'incompréhensible… "Merci jeune fille…Je crois qu'ils comprendront la leçon et qu'ils seront plus polis une autre fois…", me lança-t-elle.

C’est le lendemain matin que je me rendis compte que les verrues avaient disparu. " Il n'y a plus de boutons. Tu as vu Véronique ? Tu as vu Mamy ? ", s'écria Léa au petit déjeuner avec un sourire énigmatique et un haussement des épaules. "Après tout, c'était peut-être une allergie", jugea Maman. Il faut reconnaître que les photos qu'elle avait prises n'étaient pas assez précises pour permettre d'observer les verrues. Moi somme toute, ce qui m’importait, c’était que les visages et les mains des jumeaux étaient redevenus parfaits. 

À présent, avec le recul, cette histoire m'interpelle. N'est-elle pas là le reflet de ce manque de maturité que mon professeur de français m'attribue ?   

 

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Texte 2 sur le thème de la magie pour le 3e hors série de la revue

Publié le par christine brunet /aloys

 

Le lutin du mouchoir



 

J'ai cinq ans, la grippe et la fièvre.

Je suis dans mon lit. Dans la chambre, trois autres lits vides : papa, maman, ma sœur.

L'appartement est silencieux. Christine est à l'école, papa est au travail et maman s'occupe à des tâches silencieuses, pour protéger mon sommeil.

Je ne dors pas. J'ai le nez bouché. Pour l'instant, la position la plus confortable, c'est couchée sur le dos.

Je m'ennuie mais je n'ai pas la force de me lever.

Je sors mon mouchoir du dessous de mon oreiller.

Je l'étale devant moi sur le rabat du drap de lit.

Il ne s'est pas mis à plat. Il fait des collines et des grottes.

Je m'étonne et fixe une des entrées.

Du fond du mouchoir, au tournant d'une galerie apparaît soudain un tout petit lutin. Sa tête ne touche même pas le plafond de la grotte. Il sourit gentiment. Il a un chapeau pointu rouge, un peu tordu. Je crois qu'il est torse nu. Il porte un petit collant. Je n'ai pas eu le temps de voir la couleur, ni si les pieds sont couverts. Il est reparti vers une autre galerie.

Émerveillée et curieuse, je guette. Il y a trois ou quatre autres entrées de grottes.

Il n'avait pas l'air méchant. Faut-il un peu secouer le mouchoir ? Et si les grottes disparaissaient ?

Et si, dérangé, il devenait méchant ?

À force de surveiller les grottes, j'ai les yeux qui piquent.

Sans crier gare, le voici ! Son collant est bleu et les pieds sont couverts.

Il me fait signe de le rejoindre, son tout petit index s'agitant, levé au bout de son poing.

Oui mais comment faire ? Je n'ai rien dit. J'ai juste pensé. Pourtant, il hausse les épaules comme pour dire « Où est le problème ? ».

D'un seul coup je me retrouve debout à l'entrée du mouchoir. J'ai encore le temps de réaliser que c'est un mouchoir blanc garnis de petits papillons.

Et je suis dans la grotte. Plus de petits papillons.

Du gris et du bosselé. Il fait un peu sombre mais je vois très bien le lutin qui sautille devant moi.

Je le suis, un peu craintive et très curieuse.

Les galeries sont trop étroites pour que nous marchions l'un à côté de l'autre.

Je me surprends à penser que l'on devrait bientôt se retrouver de l'autre côté du...du quoi ? Je ne sais plus.

Il commence à faire plus clair.

Nous débouchons sur une prairie couverte d'herbe bien grasse et bien verte. Le lutin s'est retourné. Il danse et cabriole devant moi en souriant. Il ne dit jamais rien. Moi non plus d'ailleurs.

Je me sens prise de langueur. J'ai entendu maman dire ça l'autre jour quand elle était fatiguée.

Un ruisseau très étroit serpente dans a prairie. Je pourrais le traverser d'un pas.Un pas de la taille de la petite fille que j'étais avant d'entrer ici.

Le lutin cueille une grande feuille recourbée et en fait une cuillère pour puiser de l'eau dans le ruisseau.

Les sourcils levés, les yeux interrogateurs et encourageants, le sourire aux lèvres, il me propose de boire.

Ça doit être froid. C'est peut-être mauvais. J'ai soif.

Oh, je n'hésite pas longtemps ! Je suis prise de langueur, je ne sais plus réfléchir.

C'est froid, c'est bon, ça coule dans la gorge.

Je me couche dans l'herbe. Je ne sais plus où est le lutin.


Une main caresse mon front, écarte mes cheveux. 

-Tu vas mieux, bout de chou , tu n'as plus de fièvre.

-Maman ? C'est le lutin du mouchoir. Il m'a fait boire l'eau du ruisseau.

-Hum...Tu vas encore un peu rester au lit. On mettra le thermomètre tout à l'heure.

Je souris, je prends le mouchoir, je le garde en main.

 

Je m'endors.

 

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Pour le 3e Hors Série de la revue, sur le thème de la magie, Texte 1

Publié le par christine brunet /aloys

 

La petite fée, une nouvelle amie 

 

La vie offre parfois des surprises… 

 

Sébastien est triste : Benjamin son voisin, son meilleur copain, est parti hier pour aller habiter très loin, dans un autre pays.

Les nouveaux voisins sont arrivés et à mesure que l'on décharge le camion de déménagement et qu'il voit en sortir un lit-bateau, un petit vélo et une trottinette, Sébastien se met à rêver à d'autres parties de foot, d'autres balades en vélo, d'autres bandes dessinées à échanger, d'autres arbres à escalader … Bien sûr, le nouveau venu ne remplacera jamais Benjamin. Comment, en effet, recréer une amitié qui s'est bâtie lentement au cours des ans ? Pourtant, il espère…

Le lendemain matin, accoudé à la fenêtre ouverte de la cuisine, Sébastien n'en croit vraiment pas ses yeux : c'est une fille ! Elle danse sur la terrasse de la villa voisine ! Avec sa robe blanche et la baguette qu'elle tient en main, elle ressemble à une fée.

Désireux de se faire une nouvelle amie, Sébastien lui fait des grands signes, puis il sort sur la terrasse et lui lance un "bonjour" tonitruant. La petite fille ne sursaute même pas, elle ne lui adresse même pas un regard. Elle continue de danser sans se soucier de lui. 

Sébastien a très envie de faire sa connaissance et il ose aller sonner… Personne, il n'y a personne qui lui répond !

Au repas du soir, quand il raconte cela à ses parents, sa mère commence à rire ! "Tu prends tes rêves pour la réalité, mon grand !" Elle explique alors qu'en allant mettre du linge à sécher, elle a lié un peu connaissance avec Madame Durant, la voisine… : "C'est une dame charmante. Elle et son mari sont des commerçants extrêmement occupés. Ils sont les seuls habitants de la villa. Ils n'ont ni chien ni chat ni enfant !"

"Mais Maman, je l'ai vue !"

"C'est probablement une nièce des Durant…"

 Les jours se suivent et chaque fois que Sébastien regarde dehors, la fillette est toujours là… Elle danse, elle joue à la marelle sur la terrasse, elle virevolte, mais elle ne réagit pas quand il lui fait signe ou l'appelle. Sébastien remarque qu'elle ne se sépare quasiment pas de sa baguette. Il l'entend même exprimer des formules comme si elle était dotée d'un pouvoir magique. "Chat, rentre chez toi !", "Rosier, redresse-toi", "Papillon, approche-toi de moi". Et souvent, ça marche ! Le chat fait demi-tour, le papillon vient se poser sur son doigt… 

Sébastien trouve cette fille mignonne et plutôt surprenante ! Pourtant, de crainte d'être rabroué, il se garde d'en parler à ses parents. 

Le mois d'août se termine, Sébastien espère que sa voisine fréquentera la même école que lui. Là, elle sera obligée de parler et de le remarquer ! Il regrette que tant de beaux jours de vacances soient perdus en attendant la rentrée des classes.

À la fenêtre de sa chambre, Sébastien rêve… Ah s'il pouvait voir une étoile filante ! On en a parlé à la télé et il a lu un article dans le journal où l'on expliquait que c'était la meilleure nuit pour les observer. Le ciel est pourtant bien dégagé. Malheureusement, rien, il n'y a rien !

En face, la fillette est là… Il ne s'en étonne même plus. Elle danse et tourne sur la pelouse en agitant sa baguette.

Et si… 

Il l'appelle… Elle le regarde… Il lui montre le ciel et lui sourit. Elle tend sa baguette et aussitôt Sébastien peut admirer plusieurs de ces superbes étoiles filantes dont il rêvait tant. 

Sébastien se sent heureux, léger… Ça y est ! Elle s'est enfin intéressée à lui et semble plus sympathique. 

À la rentrée des classes, Sébastien occupe un banc près de la fenêtre qui donne sur la cour de récréation. Il regarde. Elle est là ! Elle sautille, elle danse, elle donne de grands coups de baguette dans toutes les directions. On dirait une ballerine sur une scène d'opéra.

Elle est dans un autre univers que celui de la classe, mais il lui faut rester attentif. Le nouvel instituteur est sévère et exigeant, il pose des questions difficiles. Souvent, Sébastien et ses amis ne savent que répondre et restent muets. Tout en réfléchissant, Sébastien jette un coup d'œil dehors, regarde la fillette et immédiatement trouve la bonne réponse. 

L'instituteur le félicite : "Bravo Sébastien ! Tu vois, quand tu t'en donnes la peine…"

C'est sûrement la fillette qui y est pour quelque chose. C'est vrai, une fois, deux fois, ça peut être le hasard, mais dix fois, vingt fois, ça ne l'est plus ! Sébastien doit en convenir, un simple coup d'œil à la cour de récréation et à son étrange visiteuse le sauve souvent de situations délicates et lui permet d'obtenir de bonnes notes. Tant et si bien qu'au fil des jours, il croit de plus en plus aux pouvoirs magiques de la fameuse baguette. 

Un jour, Sébastien qui roule en vélo fait une chute dans la légère descente vers le village. Il s'écorche le genou. La gamine apparaît : "Si tu veux, avec ma baguette…" Miracle, la douleur se dissipe !

C'est un soir de pleine lune qu'elle est partie…

Sébastien regardait distraitement par la fenêtre de sa chambre. Comme souvent, la petite voisine était là, au milieu de la pelouse. Elle lui a adressé un signe de la main, elle a tendu sa baguette vers le ciel et en un instant, elle s'est comme volatilisée.

Il s'agissait sûrement d'un signe d'adieu puisqu'il ne l'a jamais revue.

Sébastien a grandi, mais il n'a jamais oublié. Quand il se trouve face à une difficulté, il repense à la fillette et cela suffit fréquemment à l'aider. Il est resté excellent élève, est devenu un jeune homme charmant et depuis peu, il est un papa comblé.

 

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Micheline Boland nous propose ses "Haïkus de Pâques"

Publié le par christine brunet /aloys

 

HAÏKUS DE PÂQUES

 

Monde en chocolat

tout juste sorti d'un conte

on en rêve à Pâques.

 

Écouter les cloches

au cours de la chasse aux œufs

dimanche de Pâques.

 

Long week-end pascal

les œufs fondent dans les mains

des petits gourmands.

 

Sonnerie de cloches

les enfants chassent des œufs

au pied du clocher.

 

Micheline Boland

 

Publié dans Poésie

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Poème 8 du recueil poétique signé Carine-Laure Desguin : Le vieux de la zéro/vingt-trois 

Publié le par christine brunet /aloys

8

 

sur les murs colorés 

(faut c’qu’il faut)

de sa chambre soit

un cube aux normes légales

des photos supplient 

la larme à l’œil

décrochez-nous d’ici

d’ici hurlent-elles

les chariots de feux

les caravanes à queue

ne s’éternisent pas

devant un thermomètre 

digital qui n’affiche

que 

36, 8

36, 8

36, 8

histoire de pas gonfler

les chiffres des statistiques

hyperthermie basta

c’est qu’il ricane 

de tout ça

le vieux de la zéro/vingt-trois

tout en punaisant un chien plat 

à jamais muet



Carine-Laure DESGUIN

http://carineldesguin.canalblog.com

In recueil Le vieux de la zéro/vingt-trois

 

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Micheline Boland nous propose un texte à l'occasion de Pâques "Petite fugue"

Publié le par christine brunet /aloys

PETITE FUGUE

 

Ceci se passe au temps pascal, entre Rome et notre pays. En ce temps particulier, les cloches regagnent leur clocher chargées de chocolats qu'elles vont laisser tomber à proximité de chez elles dans les jardins fleuris de début de printemps. Le matin de Pâques, les enfants vont ainsi les découvrir. Moments de joie, moments d'excitation pour les petits et les plus grands.

Toutes ces cloches vont joyeusement, quoique lourdement remplies. Progresser leur est parfois pénible quand le vent hésite à souffler ou quand il souffle dans une direction contraire à celle du lieu où elles se rendent. Toutes ces cloches vont donc gaiement à l'idée de faire tant d'heureux. Toutes les cloches sauf une, une petite cloche venant d'un bourg proche d'une grande ville. Ce qui la rend d'humeur exécrable, ce n'est pas tant l'effort à fournir que la jalousie. À l'aller, elle est passée au-dessus de la ville. Elle a admiré les beaux toits de tuiles et d'ardoises, les avenues, les jets d'eau, les fontaines, les placettes et les parcs. Alors, elle envie toutes ces grosses cloches issues de cossus clochers qui vivent en grande compagnie, qui contiennent quantité de sujets en chocolat, qui produisent un son assourdissant, qui contemplent à longueur d'année un décor de rêve. Ne vient-elle pas de quitter Rome, ville majestueuse s'il en est ! Plus  elle avance, plus la jalousie qui l'habite déborde en elle.

Durant les premiers kilomètres, sa fureur est telle qu'elle raisonne à peine. Mais au fil des kilomètres, une solution s'impose. Elle va aller plus vite que toutes les autres, pour usurper une place dans un clocher de rêve, un clocher de basilique ou de cathédrale, un clocher d'où elle verra le va-et-vient de nombreux passants, d'où elle contemplera le cœur historique de la ville, d'où elle entendra les bruits d'une circulation animée. La voilà donc qui accélère la marche. Pour aller plus vite, elle se dessaisit d'un peu de chocolat. Progressivement, elle évacue presque tout son chargement. Qu'importe quelques kilos d'œufs de plus ou de moins, là où elle va, nombreuses seront les cloches qui accompliront la même œuvre qu'elle !

Ainsi, elle livre ses derniers œufs dans le jardinet entourant la cathédrale, puis elle va prendre place dans le vaste clocher. Elle est la première. Heureusement, car c'est à grand peine qu'elle reprend son souffle. Dans une large expiration, son battant va heurter ses parois. Un son s'échappe qu'elle ne se connaissait pas. Un son relativement léger pour une cloche, mais suffisant pour alerter un badaud qui, distrait, trébuche sur un banc et découvre ainsi à ses pieds un petit œuf. Le bonhomme ramasse l'œuf et s'enfuit à toutes jambes. C'est encore le petit matin, il est mal réveillé, pense-t-il.

 La petite cloche est bientôt rejointe par d'autres cloches, combien plus volumineuses, combien plus prestigieuses. Elles n'ont pas leur langue en poche. "Pars vite, tu as pris la place de Marcelle, la plus vieille d'entre nous." "Comment peut-on être aussi distraite ?" "Va vite pour rejoindre ton village, car tu viens d'un village n'est-ce pas ?" "Allez ouste, rejoins tes sœurs elles doivent être inquiètes ! Tu vas rater la fête."

La petite cloche se fait rabrouer. Bientôt, arrive Marcelle, qui d'un seul coup de battant, pourtant fort contenu, fait naître en elle une telle frayeur, qu'elle se décide à partir sous les huées de tout le carillon. La voilà désarçonnée qui vole bien vite vers son village. Ses deux sœurs l'accueillent plutôt gentiment. "Pourquoi t'es-tu tant pressée ? Ça ne valait pas la peine de tant courir pour perdre ensuite ton temps à retrouver ton chemin. Nous nous demandions où tu étais passée."

De son petit clocher, elle observe les prairies, les jardins, le bétail, les bosquets au loin. Quoi de plus reposant après son voyage que de laisser son regard parcourir ce paysage bucolique qu'elle admire pour la première fois de sa vie ? Des remords, elle en a bien sûr. Mais elle ne les manifeste pas. À  quoi bon ternir la fête en avouant un moment de faiblesse ?  À  dix heures moins quart, comme ses deux amies, elle sonne pour annoncer à tous la fête pascale ! 

Les jardins et les prés sont garnis d'œufs et sujets en chocolat aussi nombreux que les années précédentes. Il paraît que des cloches fatiguées par le long voyage accompli et découragées à l'idée du chemin qui leur restait à faire s'étaient justement un peu allégées au-dessus du bourg !

 

Micheline Boland

 

Publié dans Textes

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Paul-Olivier Delannois présente son ouvrage "L'auriculaire arraché"

Publié le par christine brunet /aloys

Court extrait du livre :

« Je hais les déménagements. Ces derniers ont toujours été pour moi une entaille dans ma recherche de solitude. Cette solitude peut paraître paradoxale pour l’homme politique que je suis, mais pourtant la réalité est tout autre. Très souvent, ce dernier se sent confronté aux bruits, aux cris, aux odeurs de ducasse, de boudin-compote et à l’accordéon. Ceci n’est souvent que façade, sorte de masque rituel au travers duquel la conscience collective feint de s’y trouver bien. »

 

Biographie :

Licencié en sciences politique à l’ULB, Paul-Olivier Delannois devient en 1994 directeur du home Valère Delcroix qui héberge des personnes handicapées. Bourgmestre de Tournai depuis 2018, Paul-Olivier Delannois est fan de vélo, de football, de littérature et de chanson française. « L’auriculaire arraché » est son premier roman.

 

Résumé du livre :

Après la mort d’un jeune, les conséquences sur les familles sont catastrophiques. Pour les parents bien entendu mais aussi, et on l’oublie souvent, pour les frères et sœurs. Chacun face au deuil a sa propre réaction et personne ne peut juger. En repartant des souvenirs avec son frère Jean-Charles, Paul-Olivier Delannois livre un témoignage poignant mais aussi plein d’humour sur une tranche de vie.

Publié dans Présentation

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Françoise Villers présente son ouvrage "Gueule de char"

Publié le par christine brunet /aloys

 

Petite notice bio-biblio-graphique

 

Née à Bruxelles en 1959.

Je vis, je ris, je pleure, je crie, j’écris. 

Rythme des mots…

Membre de l’Association des Écrivains belges de langue française.

 

Le temps qu’il reste, Théâtre des cinq continents, L’Harmattan, 2012.

Avoir vingt ans dans les années de plomb, L’Harmattan, 2013.

Si Dark, nouvelle dans le recueil Bintche Dark, Éditions du Basson, 2019.

L’homme à la plume, nouvelle dans le recueil Fragment, Éditions du Basson, 2020.

Le train, opuscule, Éditions Lamiroy, 2022.

 

Résumé

Une bien sale histoire… Mais l’histoire aussi d’une résilience. Tout près des grands arbres, à

regarder s’envoler les oiseaux…

 

 

Court extrait

 

Je ne comprendrai jamais ce que Camille foutait avec ce char. Incapable de l'appeler «père ou papa», je le nommerai pour toujours « panzer» et je n'aurai de cesse de cultiver l'espoir d'avoir un père ailleurs. Plus il y en aura, mieux ce sera : cultivons la variété.

Je m'appelle Judith. Dans une semaine, j'ai trente-quatre ans. Le panzer vit ses dernières heures, attaché à ses perfusions. Attaché enfin! Il ressemble à un pantin élimé dont les fils vont lâcher. Sur la rive de la vie qui fuit, il se cramponne encore. Il fait partie de ces détraqués qui n'admettent pas leur finitude. Je sais que je n'en aurai pas fini avec «ça» : resteront ses traces. Pestilentielles. Incrustées. Capables d'agiter les fonds à la moindre occasion. Alors faut excaver. Éclairer. Respirer.

Adossée à un vieux cerisier, je regarde ses feuilles toucher le ciel. Passent les nuages. J'écoute un merle sur la cime chanter.

 

Publié dans Présentation

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Christine Brunet en invitée du blog avec la chronique de son nouveau thriller "Malfarat" signée ANI SEDENT

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

Malfarat, un domaine au cœur d’une intrigue qui débute pendant la seconde guerre mondiale, quand la haine et les rivalités conduisaient à la mort, quand le secret était roi.

  C’est à cette même époque que naît ce qui va devenir une légende urbaine.  Mais les disparitions de jeunes filles sont-elles vraiment une légende ?  En tout cas, celles qui préoccupent la FSE et son double non officiel, dont fait partie Gwen St-Cyrq, sont bien réelles et la détermination de la légiste à retrouver ces jeunes filles n’est que plus grande quand c’est une amie qui disparait.

  L’action et les découvertes se succèdent dans cette histoire ou la confiance est une denrée rare et la traîtrise un fil rouge.

  D’une écriture qui laisse peu de place aux temps morts, Christine Brunet nous plonge dans une enquête trépidante où les protagonistes, loin d’être des enfants de chœur, poursuivent des buts rarement avouables.  Et alors que nous n’avons qu’une seule envie : tourner la page et découvrir la suite de l’intrigue, elle nous entraîne sur des chemins dangereux où la malfaisance côtoie les faux-semblants.    

  Enfin, elle nous livre une histoire consistante et un livre du genre de ceux qu’on n’a pas envie de lâcher avant d’en connaître le dénouement.  Du très bon thriller !

 

 

Ani Sedent

 

Publié dans avis de lecteurs

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