Eau, tu es la vie, un texte poétique de Jean-Louis Gillessen

Publié le par christine brunet /aloys

 

Jean-Louis Gillessen est un nouvel auteur Chloé des lys...
Il se présentera très vite sur ce blog mais en attendant, il vous propose de découvrir son univers via un texte poétique dédié à l'eau.

 


EAU,  TU  ES  LA  VIE

 

 Je suis un peu fatigué, assis au chaud dans cet estaminet. Il pleut. Fin de journée.

Choix d’un temps de pause, petit café mérité, indiqué ou non, douceur coton du brouhaha d’ambiance.

 

L’écho me parvient de phrases trop fortes et refroidies, de trompeuses discussions dans la passion,

de rires éclatés à l’unisson, trop gros, bidons, fausse cadence, alcool annonciateur de décadence.

 

                 Des femmes, des hommes, boivent, beaucoup. Trop. Ces « trop » lancés sur mon papier trottent et galopent

                 en récurrence : je ne veux pas qu’ils me dérangent, ils sont là, tout simplement. Les « trop ».

                 Ils induisent mon écrit, l'initie.

                 Alors sur cette feuille brutte de papier j’étiole leur brutalité, de ces trop qui maintenant s’apaisent

                 et s’amenuisent, in fine soulagés d’être enfin transcrits, sublimés.

                 Heureuse opportunité du pléonasme inopiné. Pas  de  hasard  dans  l’union  de  ces instantanés. 

 

                 Je suis juste fatigué, pleinement, assis dans cet estaminet. Musique de jazz « blue note ». Sourdine.

                 Mes sens en l’état se ressourcent puis s’énergisent d’être sollicités par l’écoute et l’observation de mise.

 

                  Soudain, tel un objectif manipulé par Hitchcock, mon regard en projeté zoom avant progressif,

                  pour ne plus avoir sur l’écran de ma rétine qu’une seule image pleine, ce regard mien fond précisément

                  comme œil de caméra en fondu enchaîné … sur un robinet qui coule dans un des éviers du bar comptoir.

                  Le filet d’eau coule abondamment et régulièrement. 

 

                 Parallèlement, comme si dans l’arrière-salle un  ingénieur du son inversait deux manettes,

                  les bruits d’ambiance s’effluvent, s’évolutent et disparaissent en un parfait on - off simultané,

                  pour ne plus laisser entendre que le seul roulis filtré si fidèle à l’ouïe … de l’eau qui se perd,

                  part, s’évanouit. Prisonnière des tuyaux, canalisée par l’homme, elle se doit de rester claire.

                  Claire fontaine de plaisir, créatrice de la vie. Mais ici, il y a contrainte, servitude, travail forcené

                   pour elle qui se tue. Elle ne peut s’évader, se voit gaspillée, assassinée.

                  Par faute de l’insouciance humaine, ce bien si précieux ne sert-il qu’à nettoyer les verres en ce lieu ?

Non, me dit Claire. Fontaine. Amie. La vie de l’eau est eau de vie, les gens l’écoutent, la ressentent,

la goûtent.

Sans elle, même la bière dont tu parles ne pourrait naître … l’eau en est son partenaire constitutif.

Et puis toi aussi, tu ne le sais peut-être pas, tu baignes en ton corps l’eau qui te baigne en retour,

à septante pour cent de ta personne que tu véhicules tous les jours.

 

 « Nous sommes tous emplis de tellement d’eau !? », s’exclame un client.  «Mais c’est effarant !

 Jésus Marie Joseph, Dieu soit loué, mes doigts trempés dans l’eau bénite, je prierai trois Ave !».

 

 Et la fontaine d'encore narrer qu'elle se veut claire pour les mains des enfants et des plus grands :

 ils recueillent l’eau chatoyante et chatouillante qu’elle aussi charrie.

 «  Tu me blagues  », lui distille tendrement  l’eau tout en caresses.

 Que nenni, «  Je te charrie vers eux  », lui dit-elle en souriant. Alors l'eau de ruisseler, plus en avant.

 Même si elle connaît son sort. Tournoyer au fond de l'évier, se noyer. Comble pour sa personne!

 Mais il y a les rus, les rivières, les fleuves et la mer.

 Et à chaque enfant qui naît, elle sera bien présente en lui, vaillante et bienveillante.

 Liberté de l'eau, tu es la vie.


 

                                                           Jean – Louis     Gillessen

Publié dans Textes

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M
On se croirait longeant un cours d'eau comme le fil de la pensée, d'abord lointain puis se rapprochant d'impression en impressions, d'idée en idées pour arriver à la source. Simplement, merci Jean-Louis.
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P
<br /> Bienvenue Jean-Louis !<br /> <br /> <br />  <br />
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J
<br /> Reconnaissance à vous pour vos commentaires et souhait de bienvenue.<br /> <br /> <br /> Juste mot que " l'hymne " , Carine-Laure, merci.<br /> <br /> <br /> Jean-Louis<br />
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P
<br /> Eh bien, bienvenue à Jean-Louis.<br />
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C
<br /> Un hymne, voilà c'est ça, je cherchais le mot mais c'est ça, un hymne! <br />
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C
<br /> Beau texte !<br />
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