L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 2

Publié le par christine brunet /aloys

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L'ange noir

 

Un feuilleton signé Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

Episode 2

 

 

 

 

Tu es absolument sûr que tu ne veux pas me tenir compagnie ?

Ce n’est pas l’envie qui me manque… Mais je dois voir un client potentiel, cette après-midi… Et j’ai plus de quatre-vingts kilomètres à parcourir…

Tu ne peux pas repousser cette entrevue ?

Non ! Je suis désolé… Mais nous avons échangé nos numéros…

Tu me téléphoneras ce soir ?

Oui !

Promis ?

Tu ne lâches jamais prise, n’est-ce pas ?

Je me sens bien avec toi…

Moi aussi… Alors que, il y a moins d’un jour, on ignorait l’existence de l’autre…

Ce mot me semble tellement étranger…

Lequel ?

« Existence »… Je sais… Je dis des choses qui ont l’air de n’avoir pas de sens…

Ne t’inquiète pas ! Ca fait partie de ce qui m’attire chez toi…

Merci d’être patient…

Merci d’être apparue tel un mirage…

Sans en être tout à fait conscient, tu énonces des choses tellement vraies…

Elle se serre contre moi, dépose un baiser sur ma bouche et rentre rapidement dans la maison sans se retourner.

 

l

 

Je n’ai pas d’affinité avec les politiciens. Pourtant, j’ai dû composer avec celui que je quitte à l’instant puisqu’il m’a commandé un reportage photographique afin d’agrémenter le site Internet de sa ville. Même si je suis venu souvent m’y promener, je profite de l’opportunité qui m’est offerte de repérer quelques endroits qui méritent d’être « mitraillés ». Toutefois, il n’est pas simple de me concentrer car le beau visage d’Alessandra ne cesse de se superposer aux sujets que je rencontre au gré de mes divagations et qui sont susceptibles de m’intéresser dans le cadre du travail qu’on m’a confié.

Je suis pleinement lucide qu’il est vain de nier l’attrait que cette fille séduisante exerce sur moi… Mais je le suis tout autant qu’elle a des comportements singuliers et qu’elle semble porter en elle les stigmates d’une mystérieuse blessure.

 

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Avant de reprendre la route, je ne résiste pas à la tentation de l’appeler.

Alessandra ? C’est Phil ! Tu vas bien ?

Oui ! Et toi ?

Pareillement…

Comment s’est passé ton entretien ?

De manière satisfaisante… D’ailleurs, pour fêter ça, je t’invite à dîner, ce soir… Si tu es libre, bien sûr…

Un premier rendez-vous ? C’est donc sérieux, entre nous ?

Ca te contrarie ?

Surtout pas ! Seulement, il y a si longtemps qu’un homme ne m’a plus invitée…

Je ne te crois pas… Tu es trop mignonne pour ne pas avoir une cour de soupirants…

Je t’assure ! Mais j’en assume la pleine responsabilité… Depuis mon divorce, je suis devenue asociale…

Nul besoin d’une séparation pour l’être…

J’avais donc vu juste : tu es un loup solitaire…

J’avoue une misanthropie de la plus belle eau, en effet… Je passe te prendre vers vingt heures ?

Parfait ! Phil ?

Oui ?

A ton avis, c’est prématuré de dire « Je t’aime ! » avant de raccrocher ?

Qu’en penses-tu ?

Je t’aime !

Moi aussi, mon ange noir…

 

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Je suis en avance. Alessandra achève de se préparer. Je l’attends au salon. De sa chambre me parvient l’écho d’un piano. Les notes virevoltent dans la maison comme des papillons ivres du parfum des fleurs d’été. Je reconnais sans peine la musique mélancolique – à la limite de la morbidité – du groupe espagnol Der Blaue Reiter.

Apprécierais-tu les mêmes mélodies que moi ?

Je me retourne ; elle est vêtue d’un élégant pull tunique resserré à la taille par une ceinture en cuir, d’un pantalon et chaussée d’une paire d’escarpins incrustés d’une discrète rangée de strass.

« Elle adore le noir pour sortir le soir », affirme le refrain d’une chanson… Tu es très jolie !

Merci !

Pour répondre à ta question : « Oui ! Il semblerait que nous partagions certains goûts musicaux… »

Et en ce qui concerne la couleur de ma tenue, elle est de circonstance…

Tu fais allusion à la saison ou à tes états d’âme ?

Aux deux… Mais, depuis hier, tu as réussi à colorer le triste horizon de ma vie…

Tu m’en vois heureux…

On y va ? Je meurs de faim !

 

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Il n’est pas loin de minuit lorsque nous sortons du restaurant. Bien qu’il ait cessé de pleuvoir, le bitume, toujours humide, luit sous la lumière de l’éclairage public. Je regarde Alessandra esquisser quelques pas de danse en riant.

Cette chorégraphie signifie que ça t’a plu ?

C’était savoureux… J’ai d’ailleurs exagéré un peu… Notamment avec le dessert…

Fondant au chocolat noir de noir et boule de vanille Bourbon… Ca nous fait un point commun en plus…

Serions-nous faits l’un pour l’autre ?

Va savoir !

Elle passe ses bras autour de mon cou, tend son visage vers le mien et m’embrasse avec une infinie douceur.

Si j’osais, je te demanderais de rester dormir encore à la maison…

Mais osez donc, M’dame…

Merci, M’sieur !

 

l

 

Cette nuit-là, dans un demi-sommeil, j’ai vaguement conscience d’entendre sangloter Alessandra tandis qu’elle se cramponne à moi comme pour empêcher une force obscure de se l’accaparer.

 

Fin épisode 2

La suite, demain !

 

 

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil



Publié dans Feuilleton

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C
J'essaie de deviner une suite mais je capitule. J'attends la suite...
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J
Oui, mystère mystère dans ce jeu de la séduction, de l'amour. Du hasard peut-être pas ? Vivement la suite.
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E
Décidément séduisante mais surprenante, Alessandra... nous ne sommes pas au bout de nos découvertes!
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