Carine-Laure Desguin a lu "L'amour en trompe l'oeil", de Daniel Roualland

Publié le par christine brunet /aloys

L'amour en trompe-l'oeil, c'est trois nouvelles d'un genre différent. 

La première, La cicatrice ultérieure, répond au genre fantastique. Léo-Pierre invite une bande de copains dans sa maison familiale, à Cabezac. Une magnifique propriété où tout invite encore à la vie d'antan. On mouline le café dans un vieux machin et puis on déguste le jus passé dans une chaussette de linon. Le mobilier n'est pas en reste, fauteuils Louis XV, divan Récamier, buffet à faïences et puis là, un peu plus loin, le guéridon. Vous n'avez jamais fait tourner un guéridon? demanda une des hôtes.

Les cinq complices n'étaient pas très expérimentés mais tous savaient plus ou moins comment procéder. C'est alors que la bande d'amis entendit des coups sourds qui venaient du hall d'entrée. Esprit es-tu là? Et la tasse écrivit, Oui, puis nomma l'esprit de la personne, LEOPOLDINE. 

Qui était donc cette Léopoldine et pourquoi se manifestait-elle? Et surtout pourquoi la cicatrice sur le visage de Léo-Pierre, à mesure qu'il racontait l'histoire de sa tante Léopoldine à ses amis déconfis, pourquoi donc cette cicatrice .... Je n'en dis pas plus! 

La deuxième nouvelle, La vie rêvée de B.D.  Là, on oublie le genre fantastique de la première nouvelle et on saute à pieds joints dans un univers de prolos, en Vendée. La mère de B.D. lui souffla à l'oreille, Tu dois bien travailler mon p'tit gars à l'école! L'argent ne pousse pas dans le jardin des fainéants! Fais honneur à tes parents! Sois digne de nous!

Et B.D., en effet, réussit son bac philo, zappa Science Po  et entra dans l'Administration des impôts, à Paris. À ce tableau presque parfait, il ne manquait plus à notre B.D. que l'âme soeur. C'est ici que l'histoire démarre ou se termine. À vous de décortiquer tout ça. 

La troisième et dernière nouvelle qui donne d'ailleurs son titre au livre, L'amour en trompe-l'oeil. C'est, des trois, mon texte préféré. On est à Paris et les trois-quarts de l'histoire se déroule dans un tout nouveau café, le Tabula Rasa. Un trentenaire prof de philo, Frédéric, se fracasse le nez contre le battant fermé de la double porte d'entrée sous le regard médusé de la serveuse, Ambre. Il s'avère que le Frédéric passe des heures dans ce café, il corrige ses copies, prépare les cours qu'il donne dans un lycée à deux pas de là, boit des expressos. Ambre tombe amoureuse de Frédéric. Mais la concurrence est là et se prénomme Martha, une belle traductrice, mère déjà d'une petite fille.

J'ai adoré ce texte où on devine que l'auteur, Daniel Roualland, maîtrise de solides bases en philosophie. On cite Sartre, Deleuze et consorts, mais tout cela sans prétention. Et on s'amuse à deviner comment se déroulera la suite de l'histoire. Frédéric le philosophe invite Martha la belle traductrice pour un week-end à la mer. Bien bien me direz-vous. Et puis? Et Ambre la serveuse qui a tout compris de ce qui se trame entre Frédéric et Martha, quel rôle jouera-t-elle dans tout ça? 

L'amour en trompe-l'oeil, un livre qui nous fait voyager et nous fait passer par trois genres littéraires très différents. Avec, et j'allais oublier de le souligner, cette façon que maîtrise l'auteur de nous tenir en haleine page après page tout en ciselant la psychologie de chaque personnage.

Carine-Laure Desguin

http://carineldesguin.canalblog.com

 

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P
La nouvelle est encore, à tort, un genre plutôt décrié. Ça fait mieux d'écrire un roman qu'un recueil de nouvelles. Pourtant, c'est un genre intéressant. Moi, je les aime, plutôt longues avec une chute tout à fait inattendue.
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A
Je suis d'accord. Ecrire une nouvelle est un exercice de style qui n'est certainement pas facile. Condenser ses idées, ce que l'on veut exprimer, en quelques pages demande un travail au moins aussi important qu'écrire un roman.