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"La réconciliation selon le christianisme (Les Testaments)" abordée dans l'essai d'éthique politique de Cyriaque Maixent Ebanga "Reconstruire le Congo-Brazzaville"

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

La réconciliation selon le christianisme (Les Testaments)

 

Parler du sens de la réconciliation pour les Chrétiens n’est pas aussi simple qu’il y paraît.

Une première difficulté vient du fait que le nouveau Testament (qui est à l’origine de cette conception) parle essentiellement de la réconciliation entre Dieu et les êtres humains, opérée en Jésus-Christ.

La réconciliation entre les êtres humains découle de cette réconciliation avec Dieu. Peu de passages bibliques parlent du sens « éthique » de la réconciliation qui, à l’origine, est un concept essentiellement théologique. Sa traduction en terme éthique n’est pas des plus faciles. Et ce d’autant plus qu’une deuxième difficulté surgit quand on s’intéresse de près au mot même de « réconciliation » : on verra en effet, qu’en revenant au sens étymologique de ce mot dans le Nouveau Testament, un réajustement s’avère nécessaire et utile.

Il ouvre des perspectives qui risquent de surprendre mais qui donnent à la réconciliation un sens, à la fois, plus « réaliste », mais aussi plus dynamique et stimulant. Le sens le plus courant du mot « réconciliation » vient du latin reconciliare qui signifie : se re-concilier, retrouver une harmonie, se remettre ensemble, se réunir,…

La réconciliation dans ce sens est-elle concrètement possible ?

 

Comment raisonnablement demander à des ennemis de se « réconcilier » dans le sens de revivre ensemble en harmonie, alors qu’entre eux, il y a eu non seulement des haines et des peurs – parfois ancestrales – mais aussi des assassinats, tortures, des morts, des souffrances sans nom ? Dès lors, la réconciliation à laquelle nous appelle Dieu à travers Jésus-Christ n’est-elle pas surhumaine, ne demande-t-elle pas une abnégation telle que finalement peu d’entre nous peuvent y avoir accès ? Ou alors faut-il considérer la réconciliation comme une promesse eschatologique, qui n’adviendra qu’à la fin des temps ?

En Grec, et donc dans sa « version originale », le mot réconciliation est construit sur la racine « autre » (allos), qui a donné le verbe allassô (« changer ») sur lequel sont construits le verbe katallassô (que l’on traduit par  « se réconcilier ») et le substantif katallagê (que l’on traduit par « réconciliation » ). On voit donc que dans son origine grecque, « se réconcilier » indique avant tout un changement chez la personne qui se réconcilie.

Changer à l’égard de l’autre, ce n’est pas vouloir unir ou harmoniser ce qui est fondamentalement différent, dissonant, opposé. La réconciliation côté-grec-apparaît comme un encouragement à « faire avec » les différences, les blessures, les divergences et même les incompatibilités, c’est un encouragement à en vivre dans le dialogue renoué au lieu d’en mourir dans l’ignorance de ce qu’est vraiment l’autre.

En acceptant de parler les uns avec les autres, nous acceptons de regarder en face nos différences de points de vue, mais aussi les incompréhensions, les malentendus, les idées fausses que nous avons les uns sur les autres, les peurs peut-être que nous avions les uns des autres et qui venaient s’ajouter inutilement à la réalité de nos différences.

Reste la question de la réconciliation entre les êtres humains et Dieu, « modèle » pour la réconciliation entre les humains. La Genèse nous parle de l’Alliance entre Dieu et les hommes, offerte par Dieu comme une alliance éternelle à laquelle il sera toujours fidèle. Cette première alliance, sans cesse renouvelée, est le fondement solide et stable sur lequel a pu s’appuyer et peut encore s’appuyer tout être croyant au Dieu unique, au Dieu d’amour dont nous parle la Bible. Mais alors, si cette Alliance était posée, ferme et solide, dès le début de l’histoire entre Dieu et l’humanité, pourquoi la venue du Christ a-t-elle été nécessaire à la réconciliation entre les hommes et Dieu ?

Une petite remarque de grammaire grecque s’avère ici nécessaire, simple, mais essentielle : dans le Nouveau Testament, Dieu n’est jamais sujet du verbe « se réconcilier ». Ce n’est jamais Dieu qui se réconcilie avec les hommes, mais c’est toujours Dieu qui réconcilie les hommes avec Lui. Ce sont les hommes qui ont besoin de changer de regard sur Lui à et l’égard de Lui, parce que ce sont les hommes qui ne cessent de se créer un Dieu à leur image, correspondant à leurs fantasmes, à leurs rêves, à leurs peurs.

Toute la Bible essaie de faire prendre conscience aux hommes à quel point les êtres humains ne cessent de voir Dieu, non tel qu’il tente de se révéler, mais tel que les hommes voudraient qu’il soit. C’est-à-dire un Dieu tout puissant comme les hommes voudraient l’être, manipulant les êtres humains comme ils aimeraient le faire, un Dieu aimant la perfection comme les hommes l’exigent d’eux et des autres, un Dieu punissant ceux qui ne marchent pas droit, comme les hommes aimeraient punir ceux qui leur déplaisent, un Dieu ayant besoin de violence et de la mort en l’occurrence, la mort de son Fils pour pouvoir pardonner aux hommes,…

Aussi, pour faire comprendre aux hommes qu’il n’est pas celui qu’ils croient, pour ouvrir leurs yeux et changer leurs regards, Dieu leur envoie son Fils, Jésus-Christ. Et en Jésus-Christ, Dieu se révèle de façon visible, être du côté des pauvres, des faibles, des malades, des rejetés, des mal-aimés, des marginaux, des « pas comme les autres »… Dans la vie de Jésus-Christ, Dieu se révèle radicalement tout le contraire de ce qu’imaginent les hommes. Dans la mort de Jésus-Christ, Dieu se révèle comme Celui qui ne peut empêcher l’humiliation, la souffrance et la mort de son Fils, alors que les hommes avaient tendance à croire que la souffrance et la mort étaient des punitions divines…

Dans la résurrection de Jésus-Christ, Dieu se révèle comme Celui qui veut redonner la vie là où il y a la mort. Il se montre totalement autre que la mort, alors que les hommes se plaisent à invoquer son nom quand ils tuent leurs ennemis,…

Aussi, la vie, la mort et la résurrection de Jésus-Christ ouvrent les yeux des hommes sur Dieu. C’est en ce sens qu’elles réconcilient les hommes avec Lui. Ainsi, quand Paul appelle les hommes au ministère de la réconciliation, c’est à une triple tâche qu’il les convie : mieux faire connaissance avec eux-mêmes, avec les autres et avec Dieu en renouvelant leurs regards.

Publié dans Textes, présentations

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Une histoire de coin coin ! signée par Bob le Belge

Publié le par christine brunet /aloys

 

Une histoire de coin coin !

 

Je tourne le coin profondément enfoncé dans mes pensées et m’aperçois avec étonnement que j’ai dépassé le Carrefour express de la rue Malibran où je comptais faire mes courses. Je suis distrait à un point ! Mais de là à parcourir trois cent mètres pour rien… je reviens donc sur mes pas et pénètre dans le magasin un sourire un peu niais sur les lèvres. Deux baguettes, un peu de fromage en tranches…

 

C’est en rentrant chez moi et en prenant le même coin mais dans l’autre sens, rue Lemaître, que je m’aperçois cette fois ci avec stupeur que je débouche en fait à son extrémité, devant le 200 alors que j’habite au 50.

 

Je ne suis quand même pas fou ! Pour aller au Carrefour, je sors de chez moi à droite depuis des décennies puis tourne une seconde fois à droite dans la rue Malibran…

 

Il y a quelque chose qui me turlupine. Je reviens donc sur mes pas tourne le coin Malibran à gauche et… idem. Je me retrouve tout au bout de ma rue comme si j’arrivais par l’autre côté, rue Voltaire.

 

Une vieille dame passe d’un air débonnaire et je lui demande poliment s’ils font des travaux dans le quartier.

- Non pourquoi ?

Je lui explique ma méprise.

- Ah vous aussi répond-t-elle soudain intéressée ? Voilà deux semaines que ça m’arrive mais je n’ose plus en parler car mes amies me prennent pour une folle. J’habite au numéro 20 et chaque fois que je prends ce coin, je me retrouve tout au bout de la rue à cinq cent mètres. Du coup je ne passe plus par là.

 

- Je me demande… et si nous faisions le tour du pâté de maison dans l’autre sens et débouchions tous les deux au même moment sur ce même coin en venant vous de la rue Malibran et moi de la rue Lemaître. On devrait logiquement se rencontrer, se cogner presque.. ou alors se trouver l’un et l’autre aux extrémités des deux rues mais sans se voir et donc éloignés de cinq cent mètres ? Vous avez un téléphone ?

- Oui.

- Vous avez dix minutes à perdre ?

- sûrement, d’autant plus que tout ça m’intrigue vraiment.

- Parfait, faisons comme ça, appelons-nous et restons en contact constant jusqu’au moment de tourner le coin et de se rencontrer même si nous ne serons alors distants que de quelques mètres ?

 

Croyez-le ou non, ça n’a rien donné. Je l’ai entendue dans mon écouteur jusqu’au dernier instant puis au moment de se rejoindre… plus rien. Je ne l’ai plus jamais revue.

 

Ca ne s’est d’ailleurs jamais arrangé. C’est pas gênant, gênant mais bon… Désormais je vais faire mes courses chez Leclerc en prenant à droite en sortant de chez moi. C’est un peu plus long mais j’ai l’impression que leurs baguettes sont plus fraîches.

 

Bob le Belge

 

 

 

 

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Extrait d'un journal intime retrouvé au fond d'un grenier, un texte signé Louis DELVILLE

Publié le par christine brunet /aloys

 

Extrait d'un journal intime retrouvé au fond d'un grenier


 

Samedi, le 18 mai 1861


 

Il est près de six heures et je suis réveillée. J'écris ces quelques lignes à la hâte. Aujourd'hui est un grand jour, celui de mon mariage.


 

Charles m'a choisie parmi toutes les jeunes filles de bonne famille que ses Parents ont voulu qu'il rencontre avant de faire son choix.


 

Oh, béni soit le jour où je l'ai vu, jeune officier fringant dans ce bel uniforme. Il semblait savoir que tous les regards étaient tournés vers lui et pourtant il m'a longuement fixée en s'avançant vers Mère à qui il a demandé l'autorisation de m'inviter à valser.


 

Et nous avons valsé, valsé, j'en suis encore étourdie… À minuit, comme les jeunes filles sages, j'ai obéi à Mère qui voulait quitter la salle de bal. Nous sommes reparties dans le fiacre que Père avait envoyé nous chercher.


 

Cher journal, voilà plus de cinq ans que j'attends ce jour et j'ai peur ! Peur de le décevoir, peur que Charles ne me trouve pas digne de lui, peur aussi de cette nuit de noces dont Mère m'a parlé à demi-mots et en rougissant !


 

J'aime Charles plus que tout et bientôt, je serai sienne.


 

Ceci est la dernière page de ce journal intime. Plus rien n'est écrit après ces quelques lignes…


 


 

Louis Delville

 

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La question du pardon selon différents points de vues abordée dans l'essai politique de Cyriaque Maixent Ebenga "Reconstruire le Congo-Brazzaville" : la loi du karma

Publié le par christine brunet /aloys

 

La question du pardon selon différents points de vues.

 

f-1- La réconciliation selon le Bouddhisme (La Loi du karma)

 

Pour le Bouddhisme, la cause de tout conflit est l’ignorance.

La réconciliation relève d’une sagesse, qui est l’expression de la nature de Bouddha que possèdent tous les êtres, mais qu’ils ne reconnaissent pas. Pour le Bouddhisme, les renaissances se produisent selon la loi du karma, loi naturelle de causalité selon laquelle les actes positifs font renaître dans des états heureux. L’être qui renaît n’est donc ni tout à fait le même, ni tout à fait un autre, mais plutôt l’héritier, de son enfance, de sa jeunesse.

Ainsi la réconciliation constamment prêchée par Bouddha à ses disciples peut-elle s’envisager dans trois domaines : Intérieur, extérieur et inter-réligieux. Dans le domaine intérieur, il importe de comprendre la vacuité des émotions conflictuelles : colère, jalousie, orgueil, etc., pour les abandonner et se réconcilier avec soi-même. Et, si l’état humain est plus favorable à l’Eveil, il est très fragile. Pour aller vers l’Eveil ou, à tout le moins, vers une nouvelle précieuse renaissance humaine, une conduite éthique et généreuse est indispensable. Ce qui a fait dire au Dalaï lama : « Soyez égoïstes, pratiquez l’altruisme ! »

La réconciliation extérieure naît d’un esprit paisible. Bouddha a enseigné que tous les êtres que nous rencontrons ont été nos mères dans une vie antérieure et que nous devons leur rendre leur bonté. Ainsi, un disciple de Bouddha, Sharibou, mendiait son repas (comme alors tous les moines) auprès d’une femme venant de pêcher un poisson, tenant son bébé dans les bras et frappant son chien qui voulait s’emparer du poisson. Sharibou vit le karma de ces quatre êtres. Dans leurs existences précédentes, le poisson, que la femme s’apprêtait à manger, avait été son père ; le chien, qu’elle battait sa mère ; et son bébé chéri, son pire ennemi. Sharibou, très attristé par l’absurdité du samsara (cycle des existences conditionnées), partit avant d’avoir reçu l’offrande de nourriture.

Les êtres cherchent le bonheur mais, à cause de leur ignorance, ils trouvent la souffrance, éprouvant de la haine et de l’attachement, ne voyant pas que tous sont leur propre famille. La sagesse implique l’Amour et l’équité envers tous, sans distinction entre ami et ennemi. Shantideva, un grand maître du passé, invitait ses disciples à reconnaître leur  «ennemi » comme leur maître, parce qu’il leur révélait leurs défauts.

Dans le domaine inter-religieux, les bouddhistes considèrent les grandes religions comme l’émanation de la sagesse de tous les Bouddhas. Les critiquer revient à mettre sa petite sagesse au-dessus de celle des fondateurs de ces traditions, considérés comme des bodhissattvas, êtres éveillés œuvrant pour le bien de tous, selon leurs orientations particulières. Bouddha a comparé son enseignement à une barque permettant de traverser le fleuve du samsara pour accoster sur la rive de l’Eveil : pourquoi s’attaquer à cette barque puisqu’elle deviendra inutile lorsque le but sera atteint ? Il n’y a pas lieu non plus de s’attacher à quelque opinion que ce soit.  « Lorsque l’on renonce à une opinion par le moyen de la compréhension, l’opinion en question disparaît, et demeure alors seulement la connaissance », écrit Mohan Vijayaratna, érudit bouddhiste contemporain.

Puissions-nous tous embarquer, sinon sur le même radeau, du moins ramer vers la rive de l’Eveil et y accoster dès cette vie ! Peu importeront alors les dénominations que nous aurons employées pour désigner notre embarcation. 

Publié dans Textes, présentations

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Un extrait court de l'ouvrage "Le rivage d'un océan sans terre" d'André Elleboudt

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

Je suis devenu l'architecte de mon "être le mieux possible", termes de pensée positive évitant l'expression "ne pas être mal". Et dans l'architecture nouvelle de mon être, je compris relativement rapidement qu'il me faudrait être aussi le constructeur de la nouvelle bâtisse. Sur les plans, une série de verbes que je conjuguerais le plus possible au présent de l'indicatif voire de l'impératif : décider, bouger, marcher, pédaler, réagir, positiver, lâcher prise, dormir même sans repos. Il me faudrait oublier autant que possible les verbes subir, se plaindre, râler, mijoter, gamberger, ruminer, être en forme… Pour dire le vrai, ma vie aujourd'hui est un mix de tous ces verbes, ce mélange exprimant la diversité de ma vie, de ses hauts faits, de ses gouffres.

 

André Elleboudt

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Dans son essai d'éthique politique, "Reconstruire le Congo-Brazzaville", Cyriaque Maixent Ebenga aborde la question du pardon

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

Le problème du pardon

 

e-1- Sens de la vengeance

 

Toute vengeance est tellement incommensurable de l'extermination de milliers d'être humains, parmi lesquels tant d’innocents, d'enfants et de vieillards. Aucune peine ne peut se mesurer au crime ainsi infligé au Congo. Aussi, la seule solution est de renverser le cours de l'histoire en instaurant un débat national dans le but de mettre fin à la haine, d'empêcher une nouvelle guerre, en œuvrant sans relâche en faveur d'une réconciliation.

Si la vengeance n'a, dès lors, pas de sens, le pardon n'en a pas davantage, surtout lorsque les responsables n'ont jamais renié leurs idées ni exprimé de regrets. Comment pardonner l'innommable et l'irréparable ?

 

D’ailleurs, – même si l'histoire du Congo a connu bien des barbaries et des crimes à travers ces dernières années, pour les Congolais, il restera toujours quelque chose de spécifique dans chaque guerre, quelle qu'elle soit. L'humain dans l'homme, c'est le scrupule d'être, disait Emmanuel Levinas. La politesse la plus banale peut nous révéler le fondement de l'humain. On apprend à un enfant à demander pardon avant qu'il ne sache pardonner. Il en comprend le sens plus tard. Est-ce un terme social, ethnique, théologique ou universel ?

Il y a autant de domaines d'application que le mot don. L'économie du don, à la différence de la justice, n'entre pas dans une logique d'équivalence. Dans l'idée de don, on n'attend pas la réciprocité. On donne plus qu'on ne reçoit. La justice va exiger réparation, alors que le pardon va susciter l'amnistie, qui ne peut être une amnésie. Le pardon, c'est d'abord une demande adressée à la victime, avant d'être un exercice souverain en faveur du coupable, voire du bourreau. Le pardon a quelque chose de miraculeux, car il remet en cause l'irréversibilité du temps. C'est un événement inouï qui efface d'une certaine manière ce qui est advenu. Il n'efface pas l'événement, il lui donne plutôt un autre sens.

Cette conversion de la mémoire permet à son tour un autre regard sur le futur. Mais pour trouver sa place, le passé doit être reporté à la juste distance du présent. S'il vient le hanter constamment, comme un spectre, il empêche le pardon. La condition d'un pardon, c'est la vraie mémoire, libérée de la hantise. Il s'exerce constamment une concurrence déloyale entre le pardon et l'oubli. Pardonner est un acte de mémoire. Pour pardonner une offense, il faut conserver la mémoire.

L'oubli peut se faire passer pour le pardon. Cela nous arrange quelquefois. L'oubli est un abandon à notre condition ; le pardon est une décision qui inaugure une existence nouvelle. Amnésie et amnistie ont en grec la même racine. L'amnistie ne fait souvent que cacher l'amnésie. Il y a des expériences traumatisantes dont on ne revient pas. L'on ne peut pas tout pardonner. Le pardon serait-il mort dans les camps de la mort, selon la formule célèbre de Jankélévitch ? Si l'on n'a pas fait de place à l'impardonnable, on n'a pas reconnu l'extrême gratuité du pardon. Il faut donner du temps au pardon.

 

Le pardon est-il arbitraire ?

 

Le pardon est imprévisible. Ce serait donner raison à Hitler, qui a voulu tuer l'amour, l'humain dans l'homme, donc le pardon ; Hitler a pu tuer les juifs, pas la Torah. Mais, encore une fois, seules les victimes ou leurs descendants peuvent pardonner. Si tout acte transgressif est compris comme la simple conséquence d'une cause, on risque d'écarter la responsabilité du sujet, de ne plus le traiter comme un homme, c'est dangereux.

Le pardon est fondateur de la société humaine. En définitive, c'est une rupture dans la chaîne des actions et réactions engendrées par l'offense. Il est, à la fois, utopique et absolument nécessaire. C'est une condition de l'humanité. Mais pas à n'importe quel prix… Il passe par le nécessaire travail de deuil et de mémoire.

Il protège aussi la justice contre la tentation de vengeance. Mais, inversement, l'instauration d'un tribunal humain a permis une rupture dans le cycle infernal de la vengeance. La justice instaure la distance nécessaire.

Publié dans présentations, Textes

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Extrait de l'ouvrage d'André Elleboudt, le rivage d'un océan sans terre...

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

C'est d'un plombier hors pair dont j'aurais besoin tant le sommeil de qualité et finalement le sommeil tout court s'écoule hors de moi par tant de fuites invisibles. Quand le sommeil a toujours été un allié naturel, qu'il est terriblement malaisé de faire face à sa subite absence. Se coucher à 21.30 et terminer sa nuit à minuit et parfois un peu plus tard ou bien tomber endormi au lever du jour contient un double questionnement : comment résoudre le problème afin de ne pas en faire un cauchemar… éveillé ? Que faire le reste de la nuit ?

Seul, face à un trou noir avec, pour accompagnement, le souffle lent de ma belle en sa route paisible. Seul, à ne plus désirer regarder l'heure sur le réveil tant le temps semble alors encore plus long. A force de résister avec succès à cette envie horlogère, s'installa une compétence jusque-là inconnue : la capacité d'imaginer le moment de la nuit en fonction de l'obscurité, du silence, du réveil des bruits extérieurs, du démarrage de la chaufferie… Au fil des nuits se développa une véritable lecture à l'aveugle du temps qui passe. Drôlement capable, le cerveau humain, mais trop limité pour relancer le cycle du sommeil !

Que faire le reste de la nuit ? Lire ? La lumière gênerait ma voisine. Me lever et marcher ? Mes douleurs reprendraient de plus belle, la position couchée est souvent la moins inconfortable. Descendre et m'installer à la télé ? Non, par principe.

Alors je décidai de rester au lit, d'appliquer les leçons de démaitrise apprises lors de sessions de sophrologie. Imaginer un moment de bien-être, en faire un sujet de pensée mais pas plus ; respirer, apprendre à maîtriser la respiration pour en faire une alliée de l'endormissement. Parfois cela fonctionne. A moins que cela ne soit le hasard, tout simplement.

Une dernière voie pour rentrer dans le monde de la nuit, les somnifères. Alors là, oui, je dors, mais d'un sommeil inqualifiable. Une espèce de mécanique incontrôlable s'installe : avaler, me coucher, sombrer, tracer, lutter… pour me réveiller. Mais chemin obligé, je devais essayer cette méthode pour ne pas me liquéfier, perdre le sommeil. J'ai essayé et un jour ai décidé d'arrêter au prix… non imaginé d'un sevrage "réparateur".

Et maintenant je gère mes nuits au mieux, m'endors et me réveille, parfois me rendors et parfois habite mes nuits éveillées.

 

A. Elleboudt

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"Trajectoire sans frontières", un texte signé BRUNE SAPIN

Publié le par christine brunet /aloys

Trajectoire sans frontières


 


 

Ça commence par un rêve comme tout ce qui vit. Tout commence dans un halo brumeux et songeur. Et pourtant y-a-t-il un début ? Ce serait une restriction perturbante, et qui fourvoierait le semblant de sérénité.

 

Sans régner, ça a tendance à proclamer un trouble paisible et universel.

 

Ça naît sans commencer. C’est plus net à la base qu’au sommet. C’est loin. Ça fait souvenir. Ça existe. C’est.

 

Il n’y a pas de frontières car elles, elles n’existent pas. Tout est vrai – tu es vrai – tu mens vraiment – et je doute de tout sauf de toi. Ça n’est ni beau, ni moche, ni triste, ni un gouffre envoûtant. C’est.

 

C’est l’idée abstraite et conceptuelle de l’impossible là où j’observe que tout est possible et peut être exprimé.

 

Pour les théories : la mort, la disparition totale, le manque, l’absence, le déni, la non expérience, la non mémoire, et d’avantage que la mort, la non vie, il s’agit de creuser l’inimaginable dans le processus enclenché. A partir du rien, arriver à quelque chose – ou pas – de l’ordre de la fuite – ou pas – qu’il n’en reste rien – ou pas.

 

Ça ne peut pas se nommer mais ça se dit. C’est trop dense, trop touffu – je suis perdue – il semblerait que l’on s’y perde tous. Je capte des décalages. On compte une perte ce matin et sans le savoir concrètement je crois qu’on pleure pour ça. Il s’agit de ça, et ça amène là – tout ça pour ça.

 

Mais puisqu’il n’y a pas de finitude – puisque je la rejette de front – personne n’est en cendres ni ne le sera. J’ai faim, et soif, je nous aime et vice versa. Je respire et évidemment je ne vieillis pas – on se trompe : vieillir est le contraire d’un privilège – dans le meilleur des cas ça rassure – mais la plupart du temps ça tue.

 

Brune Sapin

1er Mars 2018

 

Publié dans Textes, Nouvelle

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Le rivage d'un océan sans terre... Extrait proposé par son auteur, André Elleboudt

Publié le par christine brunet /aloys

Un extrait

 

"Installez-vous !" Je ne savais pas que pendant des semaines, des mois, des années, cette phrase allait devenir une des (trop) nombreuses clés ouvrant les portes sur le chemin de ma… possible guérison. La table de soin des kinés, faite de délicatesse, de douceur, de vigueur, de douleur, de rire et de sourire aussi, de paix mais aussi de craintes. S'en remettre à la compétence (espérée et reconnue) et aux mains de kinés, praticiennes et praticiens généreux, chercheuses et chercheurs audacieux qu’il me fait toujours plaisir de rencontrer parce qu’ils sont pros et surtout attentionnés, délicats et de chez qui je sors dans un meilleur état que lors de mon entrée mais, malheureusement, pour un laps de temps toujours trop bref à mon goût. Plus de dix ans de kiné, deux fois par semaine en moyenne et un bien-être réel mais trop fugace et faisant parfois rêver à cette période où tout va tellement bien dans la vie que l'on n'imagine même pas que cela peut être autre. Terrible insouciance. Apprentissage douloureux de m'accepter tel dans l'espoir d'une guérison dont je ne connais que le mot.

 

Assis près d'un chemin de terre ocre et de pierre,

le regard déposé, la main sous le menton,

ses pensées s'en venaient, tantôt oui, tantôt non,

fallait-il en l'état oser d'autres traverses ?

 

Souvent ce que l'on n'a rend le pas plus alerte.

Inerte son audace. Beaucoup de lassitude

rendait la foulée morne ; l'envie d'en rester là

emplissait peu à peu le sang d'incertitude.

 

Le cœur ne se battait, le flanc ne saignait pas,

les coups n'en pouvaient plus de tant vouloir virer

de caps en espérances vers d'océans lointains,

il est loin le rivage d'un océan sans terre.

 

Que la force fait mal quand elle vient à manquer,

que la souffrance est vaine, les matins éphémères

lorsqu'en le cœur s'enfonce la dent de la douleur

et que, tel un baiser sur des lèvres d'épines,

les jours perdent saveur ; la vie est assassine.

 

Ce qui aux jours de feu, au plus profond de l'être

rend les corps fous et moites, les passions violentes,

se perd, meurt et l'amour rendu tiède et sans joie

ne peut non plus suffire, simplement à survivre.

Il est malaisé d'être à moins que d'avoir l'air.

Publié dans Poésie, Textes

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Cyriaque Maixent Ebenga nous propose la conclusion de son essai d'éthique politique "Reconstruire le Congo-Brazzaville : une approche contractualisée"

Publié le par christine brunet /aloys

 

 

Conclusion

 

Cette réflexion sur la réconciliation et la reconstruction de la société congolaise, la classe politique doit donner un message d’espérance et un signe fort aux populations, indiquer quelques défis posés dans la lutte contre l’impunité, la corruption, la prolifération des armes de guerre etc.

Il apparaît clairement que cette entreprise nécessite la participation de tous, car c’est à tous les Congolais que revient cette lourde tâche de réaliser le projet de bâtir un pays dans son ensemble comme un seul espace de vie, où les valeurs fondamentales unissent les hommes et les femmes de tous les horizons pour la plus grande ambition : l’avènement d’un nouveau Congo, capable de créativité et d’innovations dans les domaines les plus décisifs dont dépend l’avenir de la femme, à savoir la science et la technologie, l’éducation et la formation, le développement de l’esprit patriotique, l’interaction, le dialogue avec les autres non pas comme des ennemis mais des frères avec qui ils sont condamnés à vivre sur le même territoire.

Dans cette perspective, le changement de mentalité, comme nouveau comportement a comme manifestation primordiale de rassembler les hommes et de les constituer en une structure d’épanouissement pleine : la Nation.

La Nation, est en effet, nouée et constituée par l’esprit patriotique comme principe global et espace de pratique bienfaisante du pays (changements politique, économique, social et culturel.)

En manière de conclusion, reprenons les grandes articulations de notre démarche.

Nous nous sommes essentiellement attachés à circonscrire le cadre d’émergence du Congo de l’espoir dans ce Congo du désespoir. Nous avons vu que le drame est celui d’une crise des conditions mêmes de l’existence, du blocage dans le fonctionnement de tous les secteurs primordiaux de la vie sociale, de la détresse, du tribalisme que les Congolais tiennent sur eux-mêmes et sur leur destin.

Dans un, pareil contexte, il n’est pas facile de mettre fin à ces comportements à court terme et produire un espace d’espérance collectif vraiment créatif.

Tous les effets que les Congolais avaient produits, et qu’ils croyaient se donner à eux-mêmes une image fertile de leur destinée se sont avérés, n’être que des effets oniriques sans grand impact sur leur réalité.

Tout ce que nous venons d’écrire montre que la perspective d’un changement de mentalités au Congo ne sera pas seulement réduite à une réforme des systèmes de gouvernement. Elle engage tout un nouvel art de vivre que doit fonder une nouvelle perception de point de départ de la réflexion qui devra être aujourd’hui le Congo de l’espoir : celui dont les Congolais parlent peu ou presque pas par rapport à celui dont ils parlent le plus c’est-à-dire le Congo du désespoir, de l’immobilisme du doute voire de la désespérance.

Mais comment le Congo de l’espoir peut-il venir à bout du Congo du désespoir ? Par les armes de la lucidité et de la responsabilité. Ceci implique que les Congolais doivent d’abord se rendre compte de leurs faiblesses, avant de définir des qualités suprêmes qui donnent sens à la vie humaine et assurent la cohérence à l’humanité même de l’homme ; transformer une nouvelle culture fondée sur la violence en une culture de l’intercompréhension et de la solidarité réconciliatrice.

Ce sont ces enjeux-là que l’avènement de la réconciliation et de la démocratie, au sens fort du terme, feraient surgir. Il faudrait les aborder en profondeur et avec lucidité, notre effort de pensée ne peut que déboucher sur l’horizon d’où surgiront les questions ultimes sur la vie de l’homme, le destin de l’être et la destinée du pays, situées en amont et en aval, de tout effort de développement.

Ainsi, est-il urgent, pour les Congolais de prendre conscience des enjeux qui les interpellent, de réconforter les espoirs anéantis par des années de guerres civiles et entreprennent des actions en profondeur fondées sur des convictions politiques objectives. Nul doute que le vaste programme qui viendrait à bout du Congo du désespoir sera réaliste et ambitieux, loin des politiques démagogiques et de division qui ont plongé le pays dans un véritable chaos.

Certes, nul n’est à l’abri d’erreurs, mais à nos yeux, c’est l’avenir de tout un peuple qui est à la merci des armes ; une question fondamentale interpelle tous les Congolais : comment exorciser le Congo du désespoir ?

Sous notre objectif, la thérapeutique consiste en la place d’un vaste programme politique, économique, social et culturel. Le Congo a conscience, dans sa profondeur, de vivre une période bien difficile, même s’il a contribué à ce qu’elle survienne. Et sans doute ressent-il aussi la crainte que l’avenir soit plus sombre qu’on ne veut le dire, que même la prochaine alternance ne sache pas résoudre ses problèmes, qu’elle ne lui apporte qu’un soulagement passager, par des remèdes mal choisis et insuffisamment préparés, et qu’elle demeure incertaine, changeante, doutant d’elle-même dans un monde menaçant et impitoyable. La réponse à cette contrainte existe. Elle réside dans la chance, peut-être unique, offerte : la réconciliation.

Dans une situation de dérive globale que connaît le pays, la parole de Dieu aussi offre des repères que la pensée de la reconstruction a à développer conceptuellement et à définir concrètement pour gérer ces temps de crises que vivent les Congolais. Interprétée dans sa trame la plus profonde où se dévoile la destinée de l’humanité selon le projet divin, elle fournit les structures de valeurs fondamentales qui définissent clairement les orientations de lutte contre les pesanteurs et les pouvoirs de rupture entre Dieu et le monde de l’homme.

Ce sont ces valeurs anti-crise que l’esprit met en lumière comme structures de conscience et d’existence pour l’homme congolais d’aujourd’hui.

- les valeurs de travail, d’intervention et de responsabilité ;

- les valeurs de fraternité et de solidarité ;

- les valeurs de vigilance spirituelle et de confiance. Reconstruire le Congo nouveau en fonction de l’humain en tant que ferment anti-fatalité et puissance de transformation du monde en espace de vie, sans lequel les Congolais travailleront en vain.

 

Le but de cette réflexion a donc été d’amener les Congolais à changer de mentalité à réfléchir en énergie qui le feront agir en nouvelles raisons de vivre et de mourir pour la Nation, en nouvelle force de vie pour croire et espérer. N’est-ce pas là le véritable problème éthique du pays, le vrai pari pour créer un Congo nouveau et ouvrir au destin du congolais un chemin d’avenir lumineux et d’espérance ?

Publié dans présentations, Textes

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