Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

feuilleton

L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 5

Publié le par christine brunet /aloys

 

http://www.bandbsa.be/contes3/wolfenbergtete.jpg

 

L'ange noir

Un feuilleton signé Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

Episode 5 

Révélations

 

 

 

La retouche photo est un exercice périlleux ; il ne s’agit pas de travestir la réalité mais de pallier les limites techniques du reflex numérique, aussi sophistiqué soit-il, afin de rendre justice aux beautés de la nature et à certaines créations architecturales. Satisfait des légères modifications que je viens d’apporter à une série de fichiers digitaux, j’éteins l’ordinateur et descends dans le jardin. Il fait étouffant et les nuages gris foncé amenés par un vent de plus en plus fort ne présagent rien de bon. Alors qu’une rafale accompagnée de pluie balaie la terrasse, la sonnerie du téléphone retentit. Je gagne le salon à la hâte, décroche et entends la voix d’Alessandra. En proie à une crise d’angoisse, elle tente, avec difficulté, de s’exprimer au travers de ses pleurs.

Phil ! Je suis mal… Viens !

Que se passe-t-il ?

J’ai peur ! Je ne veux pas partir…

Mais… Partir où ? Je ne comprends pas…

Je t’expliquerai… Mais, s’il te plaît, viens ! Vite !

Où es-tu ?

Chez moi… Ne m’abandonne pas ! J’ai trop besoin de toi…

Surtout, ne bouge pas ! J’arrive !

 

l

 

Les trombes d’eau qui s’abattent sur la chaussée la rendent extrêmement glissante. Je suis pourtant prêt à risquer l’accident pour parcourir le trajet dans l’intervalle le plus court possible. Quand je me gare devant la maison d’Alessandra, l’anxiété se fait plus oppressante. J’ouvre la porte et monte l’escalier. Toutes les pièces sont brillamment illuminées mais vides.

Alessandra ?

Aucune réponse ne me parvient. Seule la chanson Blue jeans de Lana Del Rey – qui passe en boucle – atténue cette détestable impression de néant. Au second étage, une sorte de mélopée semble provenir de la chambre d’enfant. Pendant une poignée de secondes, je reste sans voix en contemplant la scène insolite qui se déroule sous mes yeux. Alessandra, le regard perdu dans le vide, est appuyée contre le mur qui fait face au lit. Elle ne cesse de répéter, inlassablement, la même phrase : « Je veux rester ! »

Alessandra ?

Elle tourne lentement la tête et une ébauche de sourire se dessine sur ses lèvres exsangues.

Phil ! Tu es là… Enfin !

Elle s’agrippe à moi et se met à sangloter convulsivement. Je la laisse se calmer ; puis, je prends délicatement son visage entre mes mains et la force à me regarder.

Et si tu me confiais ce secret qui te dévore ?

Oui ! Il est temps que tu saches… Mais, d’abord, promets-moi que tu m’aimes assez pour croire ce que tu vas entendre…

Je t’aime plus que tout… Et j’ai confiance en toi…

Elle soupire profondément avant de se lancer.

Le soir où nous nous sommes rencontrés – peu auparavant, pour être exacte – je venais d’avaler un flacon de somnifères… Je ne supportais plus de vivre sans mon fils…

Tu prétends que…

… Je suis morte ? Pas vraiment… Plutôt entre deux mondes…

C’est-à-dire ?

Apparemment, à l’heure de rendre l’âme, sans doute pour estomper l’appréhension qui accompagne le passage vers l’au-delà, on a la chance de retrouver un lieu qu’on a beaucoup apprécié et d’y ressentir, une dernière fois, des émotions passées.

Et pourquoi cet endroit ?

Parce que, souvent, j’y emmenais Nicolas… Je ne t’avais pas encore dit son prénom, n’est-ce pas ?

Non !

Il adorait se promener là-bas… Parfois, on allait au golf miniature… Ou il faisait une balade à dos de poney… Et je le regardais depuis ce banc… « Notre banc »… A lui et moi… Sur lequel je t’ai trouvé assis…

Il fait également partie de mes souvenirs… Une journée de rêve… En compagnie d’une femme qui a compté énormément…

J’ai immédiatement ressenti ton immense tristesse… Et la déception de ne pas être seule, avant le grand saut dans l’inconnu, s’est muée en irrésistible attirance… Quand je t’ai parlé, instinctivement, j’ai été surprise que tu réagisses… Tu m’entendais… Tu me voyais… Comme si rien n’avait changé…

Pour moi aussi, ce moment a été irrationnel… Une déchirure dans l’espace… Ou dans le temps… L’impression de vivre un événement important mais qui n’aurait pas dû être…

Tu as entièrement raison ! Je ne sais d’ailleurs pas pourquoi je suis là…

D’un geste de la main, elle montre le lit, toujours en désordre, qui m’avait tant intrigué lors de ma première visite.

Tu ne le vois pas mais mon corps gît au milieu des draps froissés… C’est cette vision – à laquelle je ne m’habitue pas – qui m’a fait perdre le contrôle de moi-même, tout à l’heure…

Alessandra…

Elle pose son index sur ma bouche.

Chut ! Ecoute les paroles, Phil… « I will love you till the end of time… »

 

l

 

Nous quittons la pièce dont nous fermons la porte et elle m’entraîne vers sa chambre.

Je suis désolée…

Pourquoi ?

Pour tous les problèmes dont je suis la cause…

C’est peu de chose en regard de ce que tu m’apportes…

Phil… Tu m’offres bien plus… C’est à toi que je dois d’exister encore…

 

l

 

Couché sur le dos, j’admire le corps nu d’Alessandra agenouillée au-dessus de moi. Elle prend mes mains, les pose sur ses seins et soude son bassin au mien. Sans me quitter du regard, elle entame un mouvement de va-et-vient. La cadence, lente, au départ, s’accélère peu à peu. A chaque fois qu’elle me rejoint, elle pousse un gémissement et ses dents, d’une blancheur laiteuse, s’enfoncent dans sa lèvre inférieure. Quand le rythme qu’elle impose à nos deux corps nous dépasse et que je viens en elle, elle cambre les reins et penche la tête en arrière ; puis, haletante, elle se couche sur moi.

Je t’aime, Phil !

Moi aussi, mon ange noir…

 

l

 

Il est plus de minuit. Le parc est plongé dans un brouillard opalescent. La pluie a cessé mais le moindre souffle de vent fait pleurer le feuillage des arbres impassibles. Alessandra et moi n’en avons cure puisque nous sommes protégés par le grand parapluie qu’elle a pris soin d’emporter.

Que va-t-il se passer, maintenant, Phil ?

Je ne sais pas… Le mieux serait de ne penser à rien d’autre qu’au plaisir d’être ensemble…

C’est vrai… Je me sens si forte quand tu es près de moi… Tu me relies à la vie…

J’ignore si Alessandra est l’un des éléments d’une énigme mystérieuse dont, plus tard, peut-être, je trouverai la clé… Mais, le plus important, c’est que je suis persuadé que cette adorable schizophrène peut me rendre heureux. Et, surtout, je n’oublie pas que, ce soir-là, sans sa présence inespérée, j’aurais mis fin à mes jours sans aucune hésitation…

 

« Je t’aimerai jusqu’à la fin des temps… »

 

FIN

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 4

Publié le par christine brunet /aloys

http://www.bandbsa.be/contes3/wolfenbergtete.jpg

 

L'ange noir

Un feuilleton signé Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

Episode 4

 

Après avoir été chaleureusement remerciés par les autorités locales pour notre participation à leur projet informatique qui connaît, auprès du public, un franc succès, Alessandra et moi vidons une flûte de champagne puis, le plus discrètement possible, nous désertons cette réception passablement ennuyeuse.

Sans avoir l’air d’y toucher, la nuit impose pas à pas son obscurité. Soudés l’un à l’autre, nous avançons lentement sur le quai qui borde le fleuve. A chaque fois que nous traversons le faisceau lumineux d’un lampadaire, je regarde Alessandra. Elle porte une robe bustier mi-longue assez moulante qui met ses formes sensuelles en valeur. Je ne sais si l’étincelle que le verre d’alcool a instillée dans ses yeux en est la cause mais je la trouve plus belle encore que d’habitude.

Au cœur d’un piétonnier, fort fréquenté en ce mois d’août, se niche le restaurant où j’ai réservé une table et qui porte le nom d’un film d’Alfred Hitchcock. Cet établissement original, aux couleurs chaudes et à l'ambiance feutrée, possède une étonnante verrière datant de 1902. C’est dans ce décor rétro que nous nous régalons tout autant de la présence de l’autre que d’une nourriture exquise. A l’heure du dessert – nous avons pris, tous les deux, des fraises à la menthe et citron vert – Alessandra me regarde, un sourire en coin.

- Ca ne te donne pas des idées ?

- Si ! On pourrait disposer ces fruits ailleurs que sur une assiette en porcelaine…

- Je vois qu’on pense à la même chose…

- Un remake du film « 9 semaines ½ » ?

- Oui !

- Ici ? Maintenant ?

- Phil ! Mais… Un soir, on essayera, dis ?

- Promis !

 

*

 

Sur l’autoroute qui nous ramène à la maison, le trafic est relativement fluide. A côté de moi, Alessandra fredonne les paroles d’une chanson de Beata Beatrix, un groupe italien de darkwave.

- Excellente initiative que d’avoir choisi ce morceau : j’affectionne cette musique pleine de nostalgie…

- Tu as un certain attrait pour tout ce qui touche à la culture gothique, n’est-ce pas ?

- Oui ! J’avoue… Mais elle ne te laisse pas indifférent non plus…

- C’est vrai… Nous partageons, toi et moi, ce goût délétère pour le spleen baudelairien

- Une manière de se prémunir contre les injustices de la vie…

- Je ne suis pas convaincu que ce soit la meilleure… Mais il est vain de s’opposer à ce que nous sommes…

- Pourquoi devrions-nous le faire ?

Elle ferme les yeux et sa voix se fait murmure.

- Je voudrais que mon fils soit là pour profiter, lui aussi, de ces inestimables fragments de bien-être…

- Il te manque terriblement… J’en suis conscient…

- Non ! Tu ne peux imaginer à quel point… Et pourtant, il est tellement présent… Je ne le vois pas mais je l’entends… Il me répète souvent qu’il est content de constater que je souris à nouveau… Grâce à toi… Mais il regrette de ne pas te connaître…

 

*

 

Ainsi qu’à l’ordinaire, Alessandra a le sommeil agité. Il me suffit, toutefois, de la toucher pour qu’elle se calme instantanément. Cette fébrilité qui est la sienne quand elle quitte l’état de veille trouve, sans aucun doute, son origine dans le traumatisme qu’elle a subi à la mort de son enfant. Je repense à ce qu’elle m’a dit, dans la voiture. Se pourrait-il que, une fois déconnectée de la réalité, elle puisse communiquer avec lui ? Décidément, je ferais mieux de dormir ; je commence, moi aussi, à me figurer n’importe quoi !

 

*

 

Je me suis toujours demandé pourquoi les dernières journées estivales exhalent un parfum de regrets. Confortablement installé à la terrasse d’une taverne, je sirote une bière brune au goût aigre-doux. Alessandra a, pour sa part, choisi un thé glacé.

Tout en piochant régulièrement dans le ravier rempli d’arachides salées, nous échangeons, depuis plus d’une heure, nos souvenirs du temps béni où nous étions des garnements heureux parce qu’insouciants.

Lorsque les clients se font trop nombreux, nous réglons l’addition et allons marcher au hasard des rues voisines. Le vent est encore tiède et agrémenté d’innombrables senteurs végétales. D’imposantes villas et leur jardin soigneusement entretenu baignent dans les couleurs délavées du crépuscule. A l’arrière de ces propriétés délimitées par de hautes clôtures en treillis, une allée s’enfonce dans un bois et s’achève, au sommet d’un éperon calcaire qui domine la vallée, en cul-de-sac. De là-haut, la vue s’ouvre sur une rivière ondoyante, des collines plantées d’arbres qui ne savent pas encore que, dans un avenir proche, ils exhiberont fièrement leur magnifique feuillage automnal et la E25, parsemée d’étoiles bicolores qui ne sont rien d’autre que les phares des véhicules qui grouillent sur toute sa largeur.

La prescience que, tôt ou tard, une menace imprécise est à venir ne remet pas en cause le sentiment de n’avoir plus connu une telle paix depuis longtemps. Mes actes manqués (qui, selon la psychanalyse, ne sont, en fait, que la réalisation de désirs refoulés) perdent leur ascendant sur moi dès lors que la passion me submerge.

Alessandra rompt le silence qui a primé tout au long de notre promenade impromptue.

- Cette masse sombre, à droite, n’est-ce pas le château que l’on voit de ta maison ?

- Si ! Il faudra que je t’y emmène… C’est un endroit plaisant…

- J’aime ces instants où nous sommes seuls, toi et moi… Loin du monde… Et cette sensation agréable d’être préservée des conséquences néfastes de sa médiocrité… Je ne veux pas renoncer à ça !

- Personne ne t’y oblige…

- Si tu savais…

- Dis-moi !

- Ne fais pas attention à mes élucubrations… Prends-moi dans tes bras, s’il te plaît… C’est là que je me sens le plus en sécurité…

- Je ne permettrai jamais qu’on te fasse du mal…

- Je sais… Je l’ai su le soir même où nous nous sommes parlé pour la première fois…

 

l

 

A peine rentrés, nous faisons l’amour. Le regard qu’Alessandra me lance, au moment de jouir, est à ce point révélateur de ce qu’elle éprouve pour moi que j’en frissonne délicieusement.

 

Episode 5 à découvrir demain !

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil


 

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 3

Publié le par christine brunet /aloys

http://www.bandbsa.be/contes3/wolfenbergtete.jpg

 

L'ange noir

Un feuilleton signé Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

Episode 3

 

Je prends divers clichés de la citadelle et du vieux pont, de la cathédrale, du théâtre et de la gare. Puis, je les transfère sur mon PC portable et effectue un premier tri. Il me tarde de les montrer à Alessandra puisque j’ai réussi, sans devoir trop insister, à l’imposer, en sa qualité d’infographiste free-lance, afin qu’elle me seconde dans mon travail.

Le chemin du retour me paraît interminable. C’est donc avec soulagement que j’aperçois l’énorme pin qui jouxte la ferme réhabilitée que j’habite.

Deux grandes grilles en fer forgé ouvrent sur une cour dont les pavés sont comparables à ceux des rues d’antan avant que l’asphalte les remplace.

Je me gare le long d’une grange transformée en garage et qui forme un « L » avec le corps de logis. La façade de celui-ci, hésitant entre briques rouges et moellons gris bleutés, est percée de fenêtres étroites à meneau et encadrement en pierre calcaire. Au pied de l’escalier, une amphore défraîchie attend des jours meilleurs pour accueillir son lot de fleurs aux couleurs vives.

Une fois la lourde porte en bois foncé refermée derrière moi, je m’imprègne de l’atmosphère de quiétude qui règne dans chaque pièce.

Un quart d’heure à peine s’est écoulé lorsque le carillon de l’entrée résonne. Alessandra se précipite dans mes bras et m’embrasse avec la fougue qui la caractérise. Comme de coutume, elle me gratifie d’un petit coup de langue humide sur les lèvres.

Ensemble, nous préparons une quiche aux poireaux et saumon fumé – qui s’accompagnera d’une bouteille de Riesling Winzenberg 2006 – et un clafoutis aux griottes. C’est l’occasion de nous remémorer des souvenirs d’enfance quand elle et moi traînions dans la cuisine familiale respective avec l’espoir d’aider à la confection du repas.

Nous terminons la soirée dans la véranda, une ancienne serre qui mélange avec harmonie le verre et la fonte artistement ouvragée. Dans un immense canapé en osier, garni de coussins en fibre de lin, Alessandra et moi, étroitement enlacés, regardons scintiller les lumières de la ville dans le lointain.

 

l

 

Après l’amour, nous nous endormons, semblables à deux fauves momentanément repus mais instruits que, demain, il faudra recommencer cette impossible quête du bonheur.

 

l

 

Vers six heures, je suis réveillé par Alessandra qui parle dans son sommeil : « Non ! Je vous en prie… Pas maintenant… Laissez-moi vivre encore un peu près de Phil… Et dites à mon fils qu’il m’attende… Il sait que je l’aime… Il ne m’en voudra pas… »

 

l

 

Le petit déjeuner se déroule dans la bonne humeur et les taquineries de l’un répondent à celles de l’autre. Je juge le moment opportun pour prier Alessandra de m’éclairer quant à ma découverte du premier soir et le curieux discours qu’elle a tenu, tôt ce matin. Des larmes emplissent son regard. Elle pose sa main sur la mienne et détourne la tête.

J’ai perdu mon fils, il y a un an…

Oh ! Je n’aurais pas dû… Je suis désolé…

Ne le sois pas… Tu as le droit de savoir…

Mais pas celui de te rappeler ce drame…

Il est mort dans un accident de roulage… Son père conduisait trop vite… A l’époque, nous étions déjà séparés mais nous gardions le contact pour notre enfant… Si tu avais la moindre idée de la haine que je peux ressentir à son égard, Phil, je te ferais horreur…

Non ! Je comprends ce que tu endures…

C’était un merveilleux petit garçon, tu sais… Un peu timide mais déjà si mature pour son âge… Il y avait une telle complicité entre nous… Il était tout pour moi…

Elle se lève, s’approche de moi et, la tête sur mon épaule, laisse libre cours à son chagrin.

Dis-moi que tu m’aimes, Phil… Pour la vie… Même si elle est, à la fois, dérisoire et cruelle…

Tu n’en es pas déjà convaincue ?

Si ! Mais l’entendre murmurer à mon oreille m’apaise…

Je t’aime, Alessandra !

 

l

 

Contrairement à l’année précédente, la rigueur des mois d’hiver ne m’a pas indisposé. Il est vrai qu’Alessandra a eu le don de me sortir de la routine qui était devenue, pour moi, un mode de vie aussi improductif que rassurant. Nous nous sommes baladés au gré des nombreux marchés de Noël qui foisonnent, en cette période, avons goûté aux plaisirs de la marche, chaussés de raquettes, dans les superbes paysages des Hautes Fagnes et nous sommes réchauffés dans d’agréables brasseries et restaurants et, plus intimement, sous la couette.

 

l

 

Même s’il ne lui est pas possible d’oublier totalement cette mélancolie qui semble être sa seconde nature, Alessandra ne cesse, chaque jour, de m’offrir le meilleur d’elle.

Le lien qui se tisse entre nous – et qui confine de plus en plus à la complétude – me fait penser, étrangement, à la lithothérapie ; à en croire les tenants de cette médecine parallèle, certains cristaux ont le pouvoir de décupler les propriétés curatives d’autres minéraux avec lesquels ils sont mis en contact. Cette comparaison a, bien sûr, ses limites puisque Alessandra ne se départit pas – au contraire – de cette manie de tenir, brusquement, dans une conversation anodine, des propos décousus. Pas plus que ne s’estompent ses cauchemars accompagnés de conciliabules déroutants avec d’invisibles interlocuteurs.

 

l

 

Nous laissons derrière nous les quelques demeures en pierres du pays, perchées sur un plateau arboré, pour descendre, par une route de campagne sinueuse, vers le large méandre d’un cours d’eau que les chaleurs d’été ont rendu indolent. Le long d’un antique chemin de halage, nous passons devant ce qui fut, naguère, une maison d’éclusier. Alessandra, dont la main ne quitte pas la mienne, s’émerveille devant le paysage enchanteur qui s’offre à nous. Soudain, face à une impressionnante muraille rocheuse, un sentier en pente douce épouse le flanc d’une colline et s’en va rejoindre le promontoire que nous avons quitté précédemment. Nous l’empruntons alors que, à l’horizon, s’amoncellent des nuages noirs qui annoncent l’arrivée probable d’un orage. Un éclair zèbre le ciel… Deux ou trois secondes s’écoulent avant qu’un grondement sourd se fasse entendre. Alessandra tressaille. Instinctivement, je passe un bras autour de sa taille et la serre contre moi. Elle se force à me sourire.

Le tonnerre m’a toujours rendue nerveuse…

Nous ne sommes plus très loin de la voiture…

Et, de fait, une dizaine de minutes plus tard, nous nous y engouffrons alors que les premières gouttes de pluie s’écrasent sur le pare-brise. Au moment de mettre le contact, les éléments naturels se déchaînent et Alessandra, apeurée, se recroqueville sur son siège.

Phil ! Je ne veux pas te quitter… S’il te plaît, protège-moi !

Chut ! Calme-toi ! Je suis là… Il ne t’arrivera rien… Je te le promets…

Tandis que je l’embrasse tendrement au coin des lèvres, je sens des larmes couler sur sa joue.

Tout va bien, petite sœur… L’orage s’éloigne… On va rentrer…

Petite sœur ?

Non ?

Est-ce bien raisonnable d’être amoureuse à ce point de son grand frère ?

A travers son regard embrumé, je distingue la profondeur des sentiments qu’elle me porte et je me sens envahi d’une joie paradoxalement douloureuse.

 

Fin épisode 3

 

La suite demain

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil


Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 2

Publié le par christine brunet /aloys

http://www.bandbsa.be/contes3/wolfenbergtete.jpg

 

L'ange noir

 

Un feuilleton signé Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

Episode 2

 

 

 

 

Tu es absolument sûr que tu ne veux pas me tenir compagnie ?

Ce n’est pas l’envie qui me manque… Mais je dois voir un client potentiel, cette après-midi… Et j’ai plus de quatre-vingts kilomètres à parcourir…

Tu ne peux pas repousser cette entrevue ?

Non ! Je suis désolé… Mais nous avons échangé nos numéros…

Tu me téléphoneras ce soir ?

Oui !

Promis ?

Tu ne lâches jamais prise, n’est-ce pas ?

Je me sens bien avec toi…

Moi aussi… Alors que, il y a moins d’un jour, on ignorait l’existence de l’autre…

Ce mot me semble tellement étranger…

Lequel ?

« Existence »… Je sais… Je dis des choses qui ont l’air de n’avoir pas de sens…

Ne t’inquiète pas ! Ca fait partie de ce qui m’attire chez toi…

Merci d’être patient…

Merci d’être apparue tel un mirage…

Sans en être tout à fait conscient, tu énonces des choses tellement vraies…

Elle se serre contre moi, dépose un baiser sur ma bouche et rentre rapidement dans la maison sans se retourner.

 

l

 

Je n’ai pas d’affinité avec les politiciens. Pourtant, j’ai dû composer avec celui que je quitte à l’instant puisqu’il m’a commandé un reportage photographique afin d’agrémenter le site Internet de sa ville. Même si je suis venu souvent m’y promener, je profite de l’opportunité qui m’est offerte de repérer quelques endroits qui méritent d’être « mitraillés ». Toutefois, il n’est pas simple de me concentrer car le beau visage d’Alessandra ne cesse de se superposer aux sujets que je rencontre au gré de mes divagations et qui sont susceptibles de m’intéresser dans le cadre du travail qu’on m’a confié.

Je suis pleinement lucide qu’il est vain de nier l’attrait que cette fille séduisante exerce sur moi… Mais je le suis tout autant qu’elle a des comportements singuliers et qu’elle semble porter en elle les stigmates d’une mystérieuse blessure.

 

l

 

Avant de reprendre la route, je ne résiste pas à la tentation de l’appeler.

Alessandra ? C’est Phil ! Tu vas bien ?

Oui ! Et toi ?

Pareillement…

Comment s’est passé ton entretien ?

De manière satisfaisante… D’ailleurs, pour fêter ça, je t’invite à dîner, ce soir… Si tu es libre, bien sûr…

Un premier rendez-vous ? C’est donc sérieux, entre nous ?

Ca te contrarie ?

Surtout pas ! Seulement, il y a si longtemps qu’un homme ne m’a plus invitée…

Je ne te crois pas… Tu es trop mignonne pour ne pas avoir une cour de soupirants…

Je t’assure ! Mais j’en assume la pleine responsabilité… Depuis mon divorce, je suis devenue asociale…

Nul besoin d’une séparation pour l’être…

J’avais donc vu juste : tu es un loup solitaire…

J’avoue une misanthropie de la plus belle eau, en effet… Je passe te prendre vers vingt heures ?

Parfait ! Phil ?

Oui ?

A ton avis, c’est prématuré de dire « Je t’aime ! » avant de raccrocher ?

Qu’en penses-tu ?

Je t’aime !

Moi aussi, mon ange noir…

 

l

 

Je suis en avance. Alessandra achève de se préparer. Je l’attends au salon. De sa chambre me parvient l’écho d’un piano. Les notes virevoltent dans la maison comme des papillons ivres du parfum des fleurs d’été. Je reconnais sans peine la musique mélancolique – à la limite de la morbidité – du groupe espagnol Der Blaue Reiter.

Apprécierais-tu les mêmes mélodies que moi ?

Je me retourne ; elle est vêtue d’un élégant pull tunique resserré à la taille par une ceinture en cuir, d’un pantalon et chaussée d’une paire d’escarpins incrustés d’une discrète rangée de strass.

« Elle adore le noir pour sortir le soir », affirme le refrain d’une chanson… Tu es très jolie !

Merci !

Pour répondre à ta question : « Oui ! Il semblerait que nous partagions certains goûts musicaux… »

Et en ce qui concerne la couleur de ma tenue, elle est de circonstance…

Tu fais allusion à la saison ou à tes états d’âme ?

Aux deux… Mais, depuis hier, tu as réussi à colorer le triste horizon de ma vie…

Tu m’en vois heureux…

On y va ? Je meurs de faim !

 

l

 

Il n’est pas loin de minuit lorsque nous sortons du restaurant. Bien qu’il ait cessé de pleuvoir, le bitume, toujours humide, luit sous la lumière de l’éclairage public. Je regarde Alessandra esquisser quelques pas de danse en riant.

Cette chorégraphie signifie que ça t’a plu ?

C’était savoureux… J’ai d’ailleurs exagéré un peu… Notamment avec le dessert…

Fondant au chocolat noir de noir et boule de vanille Bourbon… Ca nous fait un point commun en plus…

Serions-nous faits l’un pour l’autre ?

Va savoir !

Elle passe ses bras autour de mon cou, tend son visage vers le mien et m’embrasse avec une infinie douceur.

Si j’osais, je te demanderais de rester dormir encore à la maison…

Mais osez donc, M’dame…

Merci, M’sieur !

 

l

 

Cette nuit-là, dans un demi-sommeil, j’ai vaguement conscience d’entendre sangloter Alessandra tandis qu’elle se cramponne à moi comme pour empêcher une force obscure de se l’accaparer.

 

Fin épisode 2

La suite, demain !

 

 

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil



Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

L'ange noir, un feuilleton signé Philippe Wolfenberg. Episode 1

Publié le par christine brunet /aloys

 

http://www.bandbsa.be/contes3/wolfenbergtete.jpg

 

L'ange noir

Philippe Wolfenberg

philippewolfenberg.skynetblogs.be

 

 

Episode 1

 

 

La route suit fidèlement les courbes que décrit la rivière qui coule en contrebas. L’obscurité et le brouillard rendent la conduite difficile ; pourtant, je roule trop vite, perdu dans des idées macabres. J’ignore pourquoi j’ai décidé de rallier cette ville ardennaise dont j’emprunte, à présent, l’avenue principale. Je range la voiture sur le bas-côté – juste avant la rue qui mène à la gare – ainsi que je le fais à chacune de mes visites. Je marche d’un pas rapide jusqu’au parc comme si j’étais en retard à un improbable rendez-vous. Je m’assieds sur ce banc qui me rappelle des souvenirs doux-amers. Je voudrais revenir dix ans en arrière mais, ce soir, il n’y a pas de grand parapluie pour me protéger du crachin qui s’est mis à tomber ni de folles étreintes pour atténuer mon mal-être. Je fixe la sombre silhouette de la galerie qui relie les pavillons jumeaux ; puis, je ferme les yeux. Je rêve de toi que je ne connais pas encore… Toi que je rencontrerais un jour de pluie ou de grand vent. Il ferait bon me blottir dans la chaleur de tes bras. Le visage enfoui dans la soie de tes cheveux, je m’enivrerais de leur parfum aux senteurs de fruits sauvages. Tu poserais sur moi ton regard tendre et triste et tu m’offrirais un sourire plein de promesses illusoires. Je me noierais alors dans ton âme tourmentée comme dans les flots impétueux d’un océan démonté. Tu poserais tes lèvres sur les miennes et, ta garde baissée, tu t’abandonnerais sans crainte à ce moment de passion qui, une fois consumé, ne se retrouve jamais. Tu m’aimerais comme aucune autre ne l’a fait avant toi.

  • Bonsoir…

Surpris, je tourne la tête pour découvrir qu’une jeune femme se tient près de moi. Son visage au teint pâle est encadré d’une chevelure de jais coupée court. Ses yeux, aux couleurs de la nuit, m’observent attentivement tandis que ses lèvres, roses et pulpeuses, esquissent une moue sibylline. Son blouson, sa jupe, ses collants et ses bottes sont identiquement ébène.

  • Je ne voulais pas vous effrayer…
  • Ce n’est rien… Mais… Je ne vous ai pas entendue arriver…
  • C’est normal : je suis aussi silencieuse qu’un chat… Noir, en l’occurrence…
  • Et, comme lui, vous portez malheur ?
  • Vous croyez à ces superstitions ?
  • Non ! De plus, j’adore les chats…
  • Si vous continuez, je vais ronronner…
  • Plus sérieusement, est-ce bien prudent de vous promener à cette heure dans un tel endroit ?
  • Je risque sans doute moins que vous…
  • Ah ! Et pourquoi ?
  • Vous posez beaucoup de questions !
  • C’est vrai… Je l’admets… Je pose souvent des questions mais obtiens rarement des réponses…
  • C’est étrange…
  • Pardon ?
  • Septembre et octobre nous ont offert un été indien à nul autre pareil et, aujourd’hui, deux novembre, jour des morts, le temps se met au diapason…
  • Bientôt, vous allez me servir un dicton de derrière les fagots…
  • Ou vous jeter un sort !
  • Une sorcière ? J’aurais dû le deviner…
  • Mon repaire maudit est à deux pas… Ca vous tente ?
  • Vous avez l’habitude d’inviter des inconnus chez vous ?
  • Seulement lorsque la lune est pleine…
  • Avec un ciel aussi nuageux, il est difficile de savoir si c’est le cas ou pas…
  • Vous m’accompagnez ou vous continuez à déprimer seul ?

Sans attendre d’être informée de mon choix, elle glisse son bras sous le mien et m’entraîne, par un dédale de rues désertes, jusqu’aux grilles d’un jardin de taille appréciable. La maison, une belle bâtisse du 19ème siècle, semble avoir été rapportée d’un voyage en Nouvelle-Orléans. La façade, en pierre gris perle, est mise en valeur par un éclairage discret. Un petit balcon, dont la rambarde supporte, à chaque extrémité, une énorme vasque, agrémente le premier étage.

Mon guide improvisé me précède dans le hall d’entrée. L’alternance de carreaux noirs et blancs donne au sol des allures d’immense échiquier. Les eaux murmurantes d’une fontaine s’évaporent parmi les galets blancs de Carrare disposés à ses pieds. Une table basse, surmontée d’une lanterne en bois et d’un pot métallique contenant un cyclamen en fleurs, complète la décoration. L’escalier en chêne patiné nous conduit jusqu’au salon.

  • Je vous conseille le fauteuil en cuir, près de la fenêtre... Il est un peu fatigué mais très confortable…
  • Je ne voudrais pas vous en priver…
  • Je prendrai le canapé… C’est un délice que de m’y pelotonner… Un café ?
  • Avec plaisir !
  • Comment le voulez-vous ?
  • Corsé, s’il vous plaît…
  • Je vous prépare un « espresso » ?
  • Vous seriez un ange…
  • Peut-être en suis-je un ?
  • Il y a peu, vous étiez la compagne de Lucifer et, maintenant, une créature divine… Vous passez des ténèbres à la lumière avec une grande facilité…
  • Dans ma situation, ce serait plutôt l’inverse…
  • C’est-à-dire ?
  • Oubliez ! J’ai tendance à raconter n’importe quoi…

Alors que je repose la petite tasse de porcelaine blanche sur sa soucoupe assortie, je me rends compte que mon désintérêt pour la vie a fait place à une légitime curiosité dont l’objet est cette fascinante inconnue.

  • Vous ne parlez plus ?
  • Excusez-moi ! J’étais accaparé par certaines réflexions…
  • Et à quoi pensiez-vous ?
  • A vous !
  • Quel honneur ! Eh bien, figurez-vous que je pensais aussi à vous…
  • C’est la soirée des coïncidences…
  • Quel est votre prénom ?
  • Philippe… Mais je préfère Phil… Et le vôtre ?
  • Alessandra…
  • Délicieusement original…
  • Merci ! Phil ? J’ai une question… Je peux ?
  • Je croyais être le seul à en poser trop…
  • Accepteriez-vous de passer la nuit avec moi ?

Durant le silence qui suit, nous ne nous quittons pas du regard. Dans le sien, je peux lire une supplication qui n’a, pour moi, pas de raison logique mais que j’ai, néanmoins, envie d’exaucer.

  • Oui ! J’accepte volontiers…

Elle me sourit, attrape ma main et m’emmène au second étage.

 

*

 

Il m’est arrivé, auparavant, de faire l’amour avec des amantes de passage mais jamais de cette manière. Bien sûr, le désir était présent ; cependant, c’est une douce sensualité qui a prévalu tout au long de nos ébats… Comme si nous recherchions, dans le double mélange de nos corps et de nos esprits, une sérénité égarée.

 

*

 

Au petit jour, je la trouve endormie à mes côtés. Elle possède un charme qui a le don de réveiller en moi des émotions que j’imaginais – à tort – avoir oubliées définitivement.

Je me lève sans bruit, descends à la cuisine pour boire un verre d’eau fraîche et retourne me coucher. Dans le couloir, j’avise une porte entrebâillée. Négligeant ma bonne éducation, j’entre dans la pièce et tourne l’interrupteur. Je suis dans la chambre d’un enfant. Il émane de ce lieu un sentiment d’indéfinissable malaise. Le lit est défait et vide. Des jouets, des livres et des vêtements traînent un peu partout alors que, dans la garde-robe ouverte, j’en aperçois d’autres bien rangés. A tout moment, je m’attends à voir surgir un petit diable de nulle part. Mais le seul indice de sa présence est une photo, sur la commode, qui côtoie un bouquet de fleurs séchées. Je ne sais pourquoi cette vision s’associe, dans mon esprit, à celle d’une tombe. Perplexe, je rejoins Alessandra qui n’a pas bougé.

 

 

 

 

Philippe Wolfenberg

Les états d'âme de la Lune et du Soleil

 

 

Fin du premier épisode

La suite demain !

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

Le chevalier noir, le feuilleton de Christian Van Moer. Episode 9

Publié le par christine brunet /aloys

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn006_original_300_391_pjpeg_2525693_05d6d7b90c7b586466614fd1ae5f413b.jpg

 

LE CHEVALIER NOIR

feuilleton par Christian VAN MOER

 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

épisode 9 : L’Elixir de Vie

 

         Le Chevalier Noir exhibe triomphalement le septième trophée.

 

         – Tenez, sorcière. Vos exigences étant toutes satisfaites, remettez-moi l’antidote définitif.

         – Satisfaites ? Vous vous moquez, Baron ! Certes, j’ai les sept amulettes, mais il me manque deux têtes ! Vous avez laissé Myrrha et Garin en vie !

         – Ma tâche consistait à vous apporter les amulettes, non les têtes !

          – Eh bien ! il me les faut. Vous n’obtiendrez l’élixir qu’à ce prix. Il vous reste moins de deux jours pour me les apporter, Baron. En route donc, vous n’avez plus un seul instant à perdre ! Et ne tentez pas de m’agresser, vous ne pourriez m’atteindre.

 

         En effet, en avançant d’un pas vers la fée, Gilles constate avec rage qu’un mur invisible se dresse entre eux et met Sargasse hors de sa portée.

         Le désespoir l’envahit. Que faire ? Il a donné sa parole à Myrrha et sauvé Garin. Pour les trahir ensuite et les occire ? Non, sa nature franche et honnête se refuse à envisager pareille félonie.

         C’est alors que la demeure de Sargasse se met à crisser et à vibrer de toutes parts. Et au-dehors, la voix claire de la nymphe de la source se fait entendre.

 

         – Inutile de tenter de m’échapper, Sargasse. Mes chênes enserrent ta tanière pour la broyer. Le seul moyen de sauver ta peau est de livrer le précieux élixir de vie au Chevalier Noir comme tu t’y es engagée. Et prends garde : le véritable antidote, n’est-ce pas ? Tu n’ignores pas que mes arbres décèlent tout mensonge, toute fourberie, sans jamais faillir. Allez, remets-lui le flacon qu’il attend !

 

         Sargasse sait que Myrrha ne plaisante pas, qu’elle doit s’exécuter pour échapper au châtiment.

 

         –  Prenez-la et sortez aussitôt, beau paladin. N’ayez crainte, c’est le bon élixir. Courez sauver votre fille. Moi, je reste encore un peu pour empêcher Sargasse de vous poursuivre et de vous jouer un ultime mauvais tour.

         – Grand merci, Dame Myrrha. J’embrasserai Sarah pour vous.

         – Eh bien,  Myrrha ! s’écrie la fée après quelques minutes de silence et cachant mal son dépit : il doit déjà être loin maintenant, ton beau paladin. Tiens donc parole. J’ai livré l’antidote, éloigne tes arbres !

         – Tenir ma parole ? Avec toi, l’âme la plus perverse, la plus fourbe du Mauroi ? Tu rêves, Sargasse ! Le moment est venu pour toi de payer le prix de tous tes maléfices. Tu vas périr broyée dans tes murs, Sargasse ! Adieu !

 

         Au-dessus de la forêt du Mauroi, le ciel s’éclaircit et à quelques lieues de là, au manoir de Valembourg, la joie est revenue.

 

Fin

 

[ ©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

 

http://www.bandbsa.be/contes3/glaneserrancesr.jpg


Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

Le chevalier noir, le feuilleton de Christian Van Moer. Episode 8

Publié le par christine brunet /aloys

  

 

LE CHEVALIER NOIR

feuilleton par Christian VAN MOER

http://christianvanmoer.skynetblogs.be/

 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

 

épisode 8 : Le Loup-garou du Sablon

 


         − L’heure de votre dernier duel est venue, Baron ! Apportez-moi l’amulette de Garin, le Mauleu, et je vous remets l’élixir promis. Je dois reconnaître que vous l’aurez bien mérité.

         − Qui est-il, ce Garin, sorcière ?

         − Un lycanthrope, Baron, un loup-garou, pour parler comme nos vilains.

         − Un homme normal en apparence qui, on ne sait trop pourquoi, devient loup la nuit, n’est-ce pas ?

         − Oui. Ce loup-garou se déchaîne et tue les nuits de pleine lune. Je ne peux rien vous apprendre de plus à son sujet, si ce n’est qu’il vit dans l’ancienne sablonnière du Mauroi. C’est lui qui détient la septième amulette et qui se présente comme mon rival au sabbat du solstice.

Alors, Baron, Beau vous emmène au Sablon ?

         − Vous savez pertinemment que je ne suis pas en mesure de refuser, sorcière !

 

* * *

        

         « Le Mauleu, le mauvais loup, qui sévit les nuits de pleine lune ! C’est plutôt maigre comme indication. Sargasse m’a-t-elle une fois de plus caché l’essentiel ? »

 

         Le Chevalier Noir aborde les dunes désolées du Sablon sans la moindre idée de la manière dont il va s’y prendre pour dérober l’amulette à Garin. Il aperçoit une maisonnette blanche dans un creux de sable et décide de frapper hardiment à la porte. Un homme de taille moyenne, déjà chenu, mais encore très vif, l’accueille avec un sourire triste.

 

         − Entrez, je vous en prie, Messire Le Galois.

         − Vous me connaissez donc, maître Garin ?

         − Non seulement je sais qui vous êtes, mais je connais aussi le but de votre visite : l’amulette d’Abraxas.

         − Exact, maître Garin. Allons-nous nous affronter ou nous entendre ?

         − Asseyez-vous, Messire. Ecoutez d’abord tranquillement mon histoire, je vous prie.

         − Soit, maître Garin. Je vous écoute, mais je ne baisse pas ma garde. Au moindre geste suspect, je tire l’épée.

         − Ne craignez aucune fourberie de ma part, Messire. Je ne suis dangereux que la nuit, lorsque je me métamorphose en loup. Le jour, je suis un être humain comme vous. Très vulnérable et, en ce moment, à votre merci.

         − Je ne tirerai l’épée que si je m’y vois contraint, maître Garin. Poursuivez votre récit sans crainte.

         − Merci. Sachez d’abord pour quelle raison la fée Sargasse ne vient pas m’affronter elle-même. Chaque fée a son talon d’Achille, Messire, qu’elle s’efforce bien sûr de garder secret. Celui de Sargasse, c’est le sable ! Elle peut évoluer sur terre, dans l’eau ou dans les airs, mais pas sur le sable. Sous ses pas, l’arène devient mouvante. Elle s’y enfoncerait irrémédiablement et le Sablon serait son tombeau.

Mais voici mon histoire.

J’étais jadis un honnête charbonnier, plutôt jovial et bonasse. Un jour, un pèlerin moribond à qui j’ai tendu ma gourde, m’a fait don d’un anneau merveilleux. Une bague en argent sertie d’un béryl, une aigue-marine aux vertus magiques. Le temps d’une nuit, son possesseur détient le pouvoir de changer un homme en n’importe quel animal. Cet anneau ne peut être détruit que par l’eau. J’ai accepté ce cadeau empoisonné, Messire, sans avoir vraiment l’intention de recourir un jour à ses pouvoirs.

J’habitais déjà cette petite maison et je croyais être seul à y vivre. Un soir, occupé à ma toilette – j’avais bien sûr déposé ma bague à côté de ma bassine – une lame du plancher s’est soulevée et une main blanche s’est emparée de l’anneau. En retirant deux lames du plancher, j’ai alors découvert avec effarement qu’elles dissimulaient l’ouverture d’un puits, fort étroit mais très profond. Presque aussitôt, un gnome difforme, albinos, m’est apparu, le béryl à l’annulaire. Je l’entends encore me crier en ricanant : « Les nuits de pleine lune, Garin, tu mettras un cœur humain pour me nourrir, dans une besace que tu suspendras ici, si tu ne veux pas que je te change en pâture pour araignées. » Aussitôt après, il s’enfonce et disparaît dans sa galerie et moi, je me retrouve métamorphosé en loup noir ! C’est ainsi chaque nuit, Messire, et comme je ne tiens pas à être changé en mouche, les nuits de pleine lune, je tue des pauvres gens pour leur arracher le cœur.

J’en souffre chaque jour. Ah ! si vous pouviez me libérer de cette taupe immonde, je vous donnerais l’amulette bien volontiers. Mais j’en demande trop sans doute, car vous pouvez me la prendre maintenant, alors que je suis sans défense.

         – Rassurez-vous, Garin. Je ne tue que lorsque je ne puis faire autrement.

Voyons ensemble comment conjurer le sortilège de votre nabot.

Il est exclu que nous allions le déloger de son antre nous-mêmes. Le goulot du boyau est beaucoup trop étroit et friable. L’éboulement du sable, inévitable, nous étoufferait à coup sûr. Il faut donc l’obliger à venir à nous. Il ne remonte que les nuits de pleine lune pour accrocher puis décrocher son outre sanglante, m’avez-vous dit. La pleine lune est déjà passée et il n’est pas question d’attendre la prochaine. Il faut à tout prix lui faire remonter la galerie sans tarder.

         – Certes, mais comment, Messire ?

         – C’est simple. C’est un être vivant, il a donc besoin de respirer. Si nous obstruons l’entrée du goulot par un sac de sable, l’air va finir par lui manquer et il va devoir grimper pour détruire notre bouchon. C’est là que nous l’attendons.

         – J’ai bien déjà pensé à remplir carrément le puits de sable pour l’étouffer purement et simplement, mais on ne connaît pas le volume de sa réserve d’air, là-dessous. Son agonie peut être si lente qu’il aurait tout le loisir de me changer en mouche.

         – Vous avez raison, Garin. C’est pourquoi, il nous faut guetter sa remontée.

         – J’entends bien, mais comment le saisir ? Il est si vif ! A la première alerte, il se laissera retomber.

         – Je vois que vous avez là une bonne guisarme, Garin. Nous allons en faire un solide harpon.

Dès que notre sac de sable craque sous ses efforts, je frappe. Harponné par le crochet de la guisarme, il ne peut nous échapper. Il aura beau plonger au plus profond du trou, nous n’aurons plus qu’à tirer sur le filin pour l’en extirper.

         – Et lui reprendre l’anneau maudit.

         –  Afin de le détruire aussitôt qu’il aura permis votre retour parmi les hommes.

 

* * *

 

         L’horreur apparaît au bout du harpon. Une larve humaine, glabre et blafarde, d’un blanc vitreux, ensanglantée. Un corps informe, aux bras démesurés, aux jambes atrophiées, secoué de convulsions, se tortillant comme une esche accrochée à l’hameçon. Un visage morveux, hideux, haineux, éructant de sanglants borborygmes.

         Le coup d’épée du Chevalier Noir abrège les souffrances du gnome déchiqueté et Garin, surmontant sa répugnance, arrache du doigt qui se rétracte déjà l’anneau maléfique, retire la guisarme et rejette l’immonde dépouille au fond du boyau.

 

         – Je vais le combler de sable. Me voici, grâce à vous, enfin libéré du sortilège, Messire. Voici l’amulette comme promis. Mais si je peux me permettre de vous donner un conseil, méfiez-vous de Sargasse. Cette fée est fourbe et sans pitié.

         – Je sais fort bien à qui je peux me fier, charbonnier. On ne peut plus vous appeler Mauleu désormais, n’est-il pas vrai ?

         – Non, je suis heureux de pouvoir reprendre mon vrai métier.

         – Mais confiez-moi également la bague, je vous prie. Je la jetterai moi-même dans la rivière. Qu’elle ne fasse plus jamais de mal à personne.

         – La voilà. Adieu, Messire, je ne vous remercierai jamais assez de m’avoir ramené à la lumière et à la vie. Puisse le Ciel vous rendre votre enfant.

 

©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

 

 

à suivre                      

épisode 9 : L’Elixir de Vie

 

 

LE CHEVALIER NOIR

feuilleton par Christian VAN MOER

http://christianvanmoer.skynetblogs.be/

 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

 

épisode 8 : Le Loup-garou du Sablon

 


         − L’heure de votre dernier duel est venue, Baron ! Apportez-moi l’amulette de Garin, le Mauleu, et je vous remets l’élixir promis. Je dois reconnaître que vous l’aurez bien mérité.

         − Qui est-il, ce Garin, sorcière ?

         − Un lycanthrope, Baron, un loup-garou, pour parler comme nos vilains.

         − Un homme normal en apparence qui, on ne sait trop pourquoi, devient loup la nuit, n’est-ce pas ?

         − Oui. Ce loup-garou se déchaîne et tue les nuits de pleine lune. Je ne peux rien vous apprendre de plus à son sujet, si ce n’est qu’il vit dans l’ancienne sablonnière du Mauroi. C’est lui qui détient la septième amulette et qui se présente comme mon rival au sabbat du solstice.

Alors, Baron, Beau vous emmène au Sablon ?

         − Vous savez pertinemment que je ne suis pas en mesure de refuser, sorcière !

 

* * *

        

         « Le Mauleu, le mauvais loup, qui sévit les nuits de pleine lune ! C’est plutôt maigre comme indication. Sargasse m’a-t-elle une fois de plus caché l’essentiel ? »

 

         Le Chevalier Noir aborde les dunes désolées du Sablon sans la moindre idée de la manière dont il va s’y prendre pour dérober l’amulette à Garin. Il aperçoit une maisonnette blanche dans un creux de sable et décide de frapper hardiment à la porte. Un homme de taille moyenne, déjà chenu, mais encore très vif, l’accueille avec un sourire triste.

 

         − Entrez, je vous en prie, Messire Le Galois.

         − Vous me connaissez donc, maître Garin ?

         − Non seulement je sais qui vous êtes, mais je connais aussi le but de votre visite : l’amulette d’Abraxas.

         − Exact, maître Garin. Allons-nous nous affronter ou nous entendre ?

         − Asseyez-vous, Messire. Ecoutez d’abord tranquillement mon histoire, je vous prie.

         − Soit, maître Garin. Je vous écoute, mais je ne baisse pas ma garde. Au moindre geste suspect, je tire l’épée.

         − Ne craignez aucune fourberie de ma part, Messire. Je ne suis dangereux que la nuit, lorsque je me métamorphose en loup. Le jour, je suis un être humain comme vous. Très vulnérable et, en ce moment, à votre merci.

         − Je ne tirerai l’épée que si je m’y vois contraint, maître Garin. Poursuivez votre récit sans crainte.

         − Merci. Sachez d’abord pour quelle raison la fée Sargasse ne vient pas m’affronter elle-même. Chaque fée a son talon d’Achille, Messire, qu’elle s’efforce bien sûr de garder secret. Celui de Sargasse, c’est le sable ! Elle peut évoluer sur terre, dans l’eau ou dans les airs, mais pas sur le sable. Sous ses pas, l’arène devient mouvante. Elle s’y enfoncerait irrémédiablement et le Sablon serait son tombeau.

Mais voici mon histoire.

J’étais jadis un honnête charbonnier, plutôt jovial et bonasse. Un jour, un pèlerin moribond à qui j’ai tendu ma gourde, m’a fait don d’un anneau merveilleux. Une bague en argent sertie d’un béryl, une aigue-marine aux vertus magiques. Le temps d’une nuit, son possesseur détient le pouvoir de changer un homme en n’importe quel animal. Cet anneau ne peut être détruit que par l’eau. J’ai accepté ce cadeau empoisonné, Messire, sans avoir vraiment l’intention de recourir un jour à ses pouvoirs.

J’habitais déjà cette petite maison et je croyais être seul à y vivre. Un soir, occupé à ma toilette – j’avais bien sûr déposé ma bague à côté de ma bassine – une lame du plancher s’est soulevée et une main blanche s’est emparée de l’anneau. En retirant deux lames du plancher, j’ai alors découvert avec effarement qu’elles dissimulaient l’ouverture d’un puits, fort étroit mais très profond. Presque aussitôt, un gnome difforme, albinos, m’est apparu, le béryl à l’annulaire. Je l’entends encore me crier en ricanant : « Les nuits de pleine lune, Garin, tu mettras un cœur humain pour me nourrir, dans une besace que tu suspendras ici, si tu ne veux pas que je te change en pâture pour araignées. » Aussitôt après, il s’enfonce et disparaît dans sa galerie et moi, je me retrouve métamorphosé en loup noir ! C’est ainsi chaque nuit, Messire, et comme je ne tiens pas à être changé en mouche, les nuits de pleine lune, je tue des pauvres gens pour leur arracher le cœur.

J’en souffre chaque jour. Ah ! si vous pouviez me libérer de cette taupe immonde, je vous donnerais l’amulette bien volontiers. Mais j’en demande trop sans doute, car vous pouvez me la prendre maintenant, alors que je suis sans défense.

         – Rassurez-vous, Garin. Je ne tue que lorsque je ne puis faire autrement.

Voyons ensemble comment conjurer le sortilège de votre nabot.

Il est exclu que nous allions le déloger de son antre nous-mêmes. Le goulot du boyau est beaucoup trop étroit et friable. L’éboulement du sable, inévitable, nous étoufferait à coup sûr. Il faut donc l’obliger à venir à nous. Il ne remonte que les nuits de pleine lune pour accrocher puis décrocher son outre sanglante, m’avez-vous dit. La pleine lune est déjà passée et il n’est pas question d’attendre la prochaine. Il faut à tout prix lui faire remonter la galerie sans tarder.

         – Certes, mais comment, Messire ?

         – C’est simple. C’est un être vivant, il a donc besoin de respirer. Si nous obstruons l’entrée du goulot par un sac de sable, l’air va finir par lui manquer et il va devoir grimper pour détruire notre bouchon. C’est là que nous l’attendons.

         – J’ai bien déjà pensé à remplir carrément le puits de sable pour l’étouffer purement et simplement, mais on ne connaît pas le volume de sa réserve d’air, là-dessous. Son agonie peut être si lente qu’il aurait tout le loisir de me changer en mouche.

         – Vous avez raison, Garin. C’est pourquoi, il nous faut guetter sa remontée.

         – J’entends bien, mais comment le saisir ? Il est si vif ! A la première alerte, il se laissera retomber.

         – Je vois que vous avez là une bonne guisarme, Garin. Nous allons en faire un solide harpon.

Dès que notre sac de sable craque sous ses efforts, je frappe. Harponné par le crochet de la guisarme, il ne peut nous échapper. Il aura beau plonger au plus profond du trou, nous n’aurons plus qu’à tirer sur le filin pour l’en extirper.

         – Et lui reprendre l’anneau maudit.

         –  Afin de le détruire aussitôt qu’il aura permis votre retour parmi les hommes.

 

* * *

 

         L’horreur apparaît au bout du harpon. Une larve humaine, glabre et blafarde, d’un blanc vitreux, ensanglantée. Un corps informe, aux bras démesurés, aux jambes atrophiées, secoué de convulsions, se tortillant comme une esche accrochée à l’hameçon. Un visage morveux, hideux, haineux, éructant de sanglants borborygmes.

         Le coup d’épée du Chevalier Noir abrège les souffrances du gnome déchiqueté et Garin, surmontant sa répugnance, arrache du doigt qui se rétracte déjà l’anneau maléfique, retire la guisarme et rejette l’immonde dépouille au fond du boyau.

 

         – Je vais le combler de sable. Me voici, grâce à vous, enfin libéré du sortilège, Messire. Voici l’amulette comme promis. Mais si je peux me permettre de vous donner un conseil, méfiez-vous de Sargasse. Cette fée est fourbe et sans pitié.

         – Je sais fort bien à qui je peux me fier, charbonnier. On ne peut plus vous appeler Mauleu désormais, n’est-il pas vrai ?

         – Non, je suis heureux de pouvoir reprendre mon vrai métier.

         – Mais confiez-moi également la bague, je vous prie. Je la jetterai moi-même dans la rivière. Qu’elle ne fasse plus jamais de mal à personne.

 

         – La voilà. Adieu, Messire, je ne vous remercierai jamais assez de m’avoir ramené à la lumière et à la vie. Puisse le Ciel vous rendre votre enfant.

 

©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn002_small150_75_106_jpeg_2525693_fb69ffd9c215065304f785eda2760239.jpg

 

à suivre                      

épisode 9 : L’Elixir de Vie

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

Le chevalier noir, le feuilleton de Christian Van Moer. Episode 7

Publié le par christine brunet /aloys

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn006_original_300_391_pjpeg_2525693_05d6d7b90c7b586466614fd1ae5f413b.jpg

 

LE CHEVALIER NOIR

feuilleton par Christian VAN MOER

http://christianvanmoer.skynetblogs.be/

 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

 

épisode 7 : Le Pertuis maudit

 

         − Au tour de Létha, la Vouivre, Baron.

         − Je vous écoute, sorcière.

         − Elle vit dans la ravine qui court jusqu’à la lisière orientale du Mauroi ; dans une grotte profonde, insondable, aux galeries qui s’enfoncent et se perdent dans les entrailles de la Terre. A quelques enjambées de son antre s’ouvre le Pertuis Maudit, le trou aux serpents, le nid de ses tueurs qui lui obéissent aveuglément. Pour avoir une chance de la vaincre, il faut d’abord neutraliser ces sournoises cohortes rampantes.

         − Comment, sorcière ?

         − C’est votre problème, Baron. Pas le mien.

Ensuite, il vous faut la combattre de près pour lui planter votre épée dans le crâne et maintenir fermement l’acier tant que dureront ses contorsions désespérées pour s’en dégager. Elle mettra longtemps à mourir. Si vous relâchez un tant soit peu votre effort, elle se libèrera du glaive et recouvrera sur-le-champ sa forme intacte. Il faut que sa tête reste fendue jusqu’à son dernier spasme.

         − Et ses armes, ce sont ses crochets venimeux, je présume ?

         − Pas exactement, Baron. La gueule de la Vouivre est dépourvue de crochets. Dépourvue de crochets, mais non de venin mortel, une bave glauque qu’elle crache sur sa proie avec une précision diabolique à plusieurs pas de distance. Ce venin corrosif dissout toute matière qu’il atteint, brûle et ronge irrémédiablement les chairs jusqu’à la mort.

         − Existe-t-il un moyen de s’en protéger ?

         − Oui, Baron, mais il faut pour cela avoir recours à ma magie. Ce moyen, c’est votre bouclier de Croisé, pourvu que vous le prépariez exactement comme je vais vous l’indiquer… Quelle est la devise des barons de Valembourg ?

         − … Cum decore vincere, pourquoi cette question, sorcière ?

         − Vaincre avec honneur… Parfait. Recouvrez votre écu de parchemin, de vélin pour être précis, sur lequel vous aurez transcrit la devise de votre lignage avec votre sang, Baron : le venin de Létha n’aura aucun effet sur lui. Mais ne perdez pas de vue que votre bouclier ne protège pas votre destrier ni vous-même entièrement. Il vous faudra combattre à pied et parer tous les jets de bave ! La Vouivre visera aussi bien vos pieds que votre chef, le bras qui manie ou la main qui tient le glaive. Un instant de relâchement et c’est la fin. Mais avec le crâne fendu jusqu’au menton, elle ne peut plus cracher.

         − Diantre !... Avez-vous du vélin, sorcière ?

         − Oui, Baron. Préparons votre égide.

 

* * *

 

         «  Beau vole beaucoup plus bas et plus près de moi, aujourd’hui. Craint-il que je le perde de vue ? »

 

         Le Chevalier Noir ignore que la fée Sargasse a pris l’apparence de son corbeau, car elle tient absolument à assister au combat et espère pouvoir se repaître de l’agonie de Létha, sa pire ennemie. En vue du Pertuis Maudit, elle feint de faire demi-tour, mais se perche sur la cime d’un grand hêtre, d’où elle pourra tout observer.

         Gilles descend de cheval au bord de la ravine et examine longuement la configuration du lieu avant de s’y aventurer. Il aperçoit la Vouivre aller et venir aux abords de son antre, mais ne remarque aucun serpent.

 

         « Bonne affaire ! Ces satanées bestioles sont dans leur trou. Je vois distinctement la gueule noire et béante de la fosse d’ici ; elle n’est pas bien large, me semble-t-il. Comment pourrais-je condamner ce passage sans me faire assaillir ? »

 

         Gilles remarque alors un gros quartier de roche, plus ou moins sphérique, éboulé jusqu’à un pas du bord du chemin creux.

 

         «  Voilà ce qu’il me faut ! On dirait qu’il s’est arrêté là exprès et qu’il n’attend que moi ! s’exclame-t-il. Si je parviens à faire basculer cette masse dans la ravine, elle va dévaler le versant et filer droit vers l’aven. La pente est douce, sa course sera plutôt lente, peut-être même sera-t-elle encore un peu ralentie par les hautes herbes ; mais si mon calcul est exact, le trou l’arrêtera tout net et l’ouverture sera bel et bien obstruée ! Allons, Valembourg, au travail ! Commence par déblayer le sol autour de la roche et creuse ce qu’il faut du bon côté avec ton épée jusqu’à ce qu’elle bascule. »

 

         De son observatoire, Sargasse admire l’intelligence du Chevalier Noir et croasse de joie en voyant que le rocher s’enfonce pile et suffisamment dans le pertuis pour le fermer hermétiquement.

Attirée par le bruit, la Vouivre sort de sa grotte et, verte de rage, remonte la ravine à la rencontre de l’intrus qui, loin de tourner les talons, s’avance résolument vers elle.

         Gilles constate avec surprise que Létha a un fort joli corps de femme et que son visage, s’il n’était dépourvu de nez et n’avait le menton fuyant, serait franchement avenant.

         La beauté nue contre le guerrier bardé de fer ! L’issue du combat paraît évidente. Et pourtant charme et poison sont les armes les plus redoutables.

 

         « Ne te laisse pas envoûter et distraire par sa beauté, Baron ! s’affole Sargasse. Dis-toi bien que c’est un monstre, qui extermine sans pitié les voyageurs – hommes, femmes, enfants – qui ont le malheur de s’égarer dans sa ravine en traversant la forêt. Manie l’écu et l’épée comme jamais tu ne les as maniés. Ce sont dix Sarrazins qui t’encerclent et te pressent ! C’est l’Hydre aux sept têtes ! L’Octopode des abysses ! Fixe ses yeux, Baron : ils t’indiquent où elle va cracher son venin. »

 

         Schpffft ! Létha est vive et souple. Schpffft ! Elle esquive les coups de glaive du Chevalier Noir sans peine. Schpffft ! Gilles utilise son bouclier avec une habileté remarquable. Schpffft ! Le combat s’éternise. Schpffft ! L’issue est incertaine. Schpffft !

Sargasse se décide alors à intervenir. En vol plané, sans bruit, elle surgit dans le dos de la Vouivre et lui donne un violent coup de bec avant de se sauver à tire-d’aile. Surprise, Létha se retourne. Schpffft ! Instant de distraction fatal : le Chevalier Noir ne laisse pas passer l’occasion de lui fendre le crâne. Elle a beau se débattre, se tortiller, se contorsionner pour se dégager, l’épée, tenue d’une main ferme, finit par la clouer au sol. Le soleret du vainqueur lui écrase le ventre pour l’immobiliser tout à fait. Peu à peu ses yeux étonnés s’éteignent et se ferment à jamais. Par précaution, Gilles attend encore un peu avant de retirer son épée pour lui trancher la tête et lui prendre l’amulette.

 

[ ©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn006_small150_75_108_jpeg_2525693_a39c3de5169b1ce92cc1721e5fec5cf3.jpg


                      

à suivre

 

épisode 8 : Le Loup-garou du Sablon

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

Le chevalier noir, le feuilleton de Christian Van Moer. Episode 6

Publié le par christine brunet /aloys

http://www.bandbsa.be/contes/chrismellone.jpg

 
 
LE CHEVALIER NOIR

feuilleton par Christian VAN MOER

 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

 

épisode 6 : Le Nain des Dents-la-Lune

 

         En suivant Beau aux Dents-la-Lune, le repaire du nain Andros, le Chevalier Noir se remémore la mise en garde de Myrrha la nymphe.

 

         « Myrrha a vu juste. En me désignant le nain comme cible, Sargasse ne m’a pas dévoilé toute la vérité. Certes, Andros demeure bien aux Dents-la-Lune ; certes, il a bien trois yeux, dont le central, dépourvu de paupières et donc toujours en éveil, lui permet de localiser et de surveiller le plus imperceptible mouvement, même la nuit. Certes, ce monstre est pourvu de deux crochets de cobra mortifères ; certes, il se déplace par bonds déroutants, rapides et impressionnants, qui le rendent pratiquement insaisissable. Mais la sorcière s’est bien gardée de me révéler qu’Andros est son propre fils ! Qu’elle l’a eu de Polyandre, le cyclope, ce qui explique ce troisième œil. Elle m’a caché qu’éperdument éprise de Polyandre et folle de jalousie, Létha, la vouivre, a fait mordre sa rivale par ses serpents durant sa gestation. D’où les crochets de cobra. Et elle s’est surtout bien gardée de me dire que, dans un accès de démence, elle a tenté d’étouffer sa monstrueuse progéniture dans son berceau, provocant la colère de Polyandre, qui l’en a empêchée et l’a alors quittée pour mettre leur rejeton hors d’atteinte et l’élever lui-même aux Dents-la-Lune. D’où la haine féroce que le nain nourrit pour sa mère.

Oui, le véritable dessein de Sargasse apparaît de plus en plus clairement. La haine entre la mère et le fils, la rancœur irrépressible qui oppose la sorcière et la vouivre prouvent à l’évidence que Sargasse veut nettoyer le Mauroi de ses hôtes démoniaques pour y régner seule et sans crainte. Et moi, Gilles de Valembourg, je suis forcé de faire son jeu ! Maudite soit cette créature infernale ! »

 

         Ravalant son exaspération, le Chevalier Noir atteint l’alignement semi-concentrique des menhirs que les bûcherons et les charbonniers de la forêt du Mauroi prétendent être des dents titanesques tombées de la Lune. En chemin, pour affronter Andros, il a mis au point une stratégie toute simple.

 

         « Etant donné que je ne peux approcher le nabot sans me faire repérer et que de toute façon ses bonds de sauterelle le rendent insaisissable, au lieu d’aller à lui, je le fais venir à moi. Par la ruse. En louvoyant entre les pierres dressées, je simule un malaise soudain et je tombe de cheval. Feignant l’évanouissement, j’attends l’attaque du monstre sans remuer un seul muscle. Mon haubert me protègera, et dès qu’il relève le ventail de mon heaume pour me planter ses crochets de serpent dans la figure, avant qu’il ait le temps de me mordre, je le saisis à la gorge. Mes gantelets ne lâcheront pas leur prise, ils l’étrangleront et lui briseront la nuque. Et je n’ai plus qu’à lui trancher le col pour m’emparer de son amulette. »

 

         Ainsi dit, ainsi fait.

 

         « Exécution sans bavures, rapide, facile même.

Bien, j’ai deux jours devant moi. Si j’allais rendre compte du succès de ce combat éclair à la belle Myrrha ?... Pour la remercier de m’avoir si bien renseigné…

         Plus que deux, sorcière ! »

 

[ ©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn002_small150_75_106_jpeg_2525693_fb69ffd9c215065304f785eda2760239.jpg

 

à suivre                        

épisode 7 : Le Pertuis maudit

 

 

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

Le chevalier noir, le feuilleton de Christian Van Moer. Episode 5

Publié le par christine brunet /aloys

 

http://www.bandbsa.be/contes/chrismellone.jpg

LE CHEVALIER NOIR

 feuilleton par Christian VAN MOER

 

http://christianvanmoer.skynetblogs.be/


 

Au temps des heaumes et des hauberts,

il était une fois la forêt du Mauroi…

 

 

 

épisode 5 : La Nymphe de la source

 

         A en croire la fée Sargasse, la nymphe Myrrha, qu’elle désigne comme nouvelle adversaire au Chevalier Noir, est bien, malgré les apparences, une créature démoniaque.

 

          − Ses pouvoirs sortent de l’ordinaire, Baron. Elle commande à la végétation qu’elle plante de ses propres mains ! Ses graines germent en une nuit, ses plants croissent en quelques jours à peine.

         − En quoi faut-il redouter pareil pouvoir, sorcière ?

         − Ses arbres sont ses gardes du corps et son armée. Ces géants sont capables d’étreindre et d’étouffer une tour jusqu’à ce qu’elle s’écroule. A son incantation, ses plantes épineuses vous injectent un venin paralysant, ses plus jolies fleurs diffusent un parfum létal. Ne vous laissez pas prendre au charme de sa beauté et de ses manières avenantes, Baron ! Myrrha est une enchanteresse dévoreuse d’hommes !

         − Je me tiendrai sur mes gardes, sorcière. Vous pouvez lâcher Beau.

 

* * *

 

         « Diantre ! s’émerveille le Chevalier Noir, je ne m’attendais pas du tout à découvrir un lieu aussi charmant dans cette sinistre forêt ! Myrrha règne sur un vrai jardin d’Eden ! Ce frais nymphée, cette eau cristalline qui sourd de la faille en chantonnant, ces arbres majestueux, cette herbe grasse, ces fleurs au divin parfum... Est-ce bien là le séjour d’un esprit maléfique ? J’ai peine à le croire. »

 

         Gilles ne le sait pas encore, mais il est déjà prisonnier du site enchanteur.

         Lorsqu’il aperçoit la nymphe descendre la colline pour regagner son domaine idyllique, il pense à s’éloigner et à s’embusquer. Mais l’accueillant saule pleureur, dont il a choisi l’ombre pour se protéger de l’ardeur du soleil, se met aussitôt à frémir. Avec la force inattendue des plus sauvages lianes, les tiges grêles de la ramée tombante s’étirent encore et encore pour agripper l’intrus et le garrotter.

         La jeune femme qui apparaît a la beauté de Vénus. Avec un sourire enjôleur, un tantinet narquois, elle s’adresse à sa capture.

 

         − Inutile de vous débattre, fier paladin, vous ne réussiriez qu’à vous étouffer davantage. Quel mauvais  vent nous amène donc le Chevalier Noir dans ces parages, dites-moi ?

         − Ce n’est pas nécessairement un vent mauvais, Dame Myrrha.

         − Attention à vos paroles, paladin. Au premier mensonge, mon saule préféré vous étrangle et vous broie.

 

         Gilles sent alors instinctivement qu’il doit jouer la carte de la franchise et lui apprend qu’il doit s’emparer de son amulette pour sauver son enfant.

 

         − L’amulette d’Abraxas, que je porte au cou ?...  Eh ! rien que ça ?... Ma foi, tout compte fait, je me sens disposée à vous accorder une chance de la gagner, paladin. A trois conditions.

         − Lesquelles, Dame Myrrha ?

         − Sine qua non, paladin. La première ? Que vous me contiez tout depuis le début, par le menu, sans omettre un seul détail. N’oubliez pas, je peux me montrer impitoyable.

          − Soit. Au point où j’en suis, pourquoi vous cacherais-je la vérité ?

 

         La nymphe écoute le récit du Chevalier Noir sans l’interrompre. A la fin, après quelques minutes de silence, elle lui fait part de sa réflexion.

 

         − Ainsi, c’est la vieille Sargasse qui est l’instigatrice de tout. Sept éliminations à mener à bien, dites-vous ? Sept travaux d’Hercule ! Et moi, Myrrha, je suis la quatrième cible de la liste !... La cinquième a déjà été désignée : c’est Garin, le Mauleu… Voyons, les deux dernières ne peuvent être qu’Andros, le nain et Létha, la vouivre.

Mais Sargasse vous ment depuis le début, paladin. Les amulettes ne sont qu’un prétexte. Elles ne nous sont pas indispensables pour avoir le droit de voter lors de nos sabbats ! Ce sont des amulettes protectrices. Comme toute amulette ; et c’est le signe d’appartenance à notre section. En réalité, Sargasse espère que vous allez nous anéantir tous les sept pour être la maîtresse absolue du Mauroi.

Personnellement, les exécutions de Gargan, Noxdies et Tarpéa ne me font ni chaud ni froid ; celles d’Andros, de Létha, de Garin, pas davantage. Mais vous comprendrez aisément, paladin, que je ne tiens pas à faire partie du lot !

         − Cependant, vous parliez de m’accorder une chance, Dame Myrrha…

         − Oui. Sargasse l’ignore, mais je détiens deux amulettes d’Abraxas. Car lorsque le cyclope Polyandre, son amant, lassé des rivalités et des guéguerres incessantes entre les esprits de la forêt, a résolu de s’exiler sous d’autres cieux, il m’a laissé la sienne. Je pourrais donc vous en céder une, pourvu que Sargasse croie que vous avez réussi à me la dérober par ruse, sans être obligé de m’occire. Elle sera forcément déçue de me savoir toujours en vie, mais vous remettra la précieuse ampoule sans rechigner, vu qu’elle a encore besoin de vos services pour être débarrassée des trois autres.

         − Quelle est votre seconde condition ?

         − Que vous me juriez sur la tête de la petite Sarah que vous ne tenterez plus jamais rien contre moi.

         − Je vous le jure, Dame Myrrha. Et la troisième ?

         − Vous êtes tellement mignon, paladin, que je veux vous avoir à dîner ce soir et qu’ensuite nous passions ensemble une torride nuit d’amour. Acceptez-vous ?

 

         Eberlué par cette proposition inattendue, Gilles ne peut que bredouiller :

 

         − Bien volontiers.

         − Mon saule desserre son étreinte et vous libère, beau paladin ! C’est que vous avez répondu sincèrement à toutes mes questions : l’arbre ne se trompe jamais. Prenez mon bras, voulez-vous ? Je vous emmène boire un rafraîchissement sous la tonnelle. Demain matin, vous pourrez ôter cette amulette de mon cou sans être forcé de me l’arracher.

 

* * *

 

         − Et de quatre, sorcière ! crie le Chevalier Noir en jetant l’amulette de la nymphe sur la table de Sargasse.

         − Myrrha est morte ?

         − Non, il ne m’a pas été nécessaire de la tuer. L’ampoule d’antidote, je vous prie.

         − La voilà, Baron, maugrée la vieille, suspicieuse. A bientôt.

 

[ ©  Christian Van Moer  & Chloé des Lys ]

http://static.skynetblogs.be/media/120110/dyn007_small150_75_103_jpeg_2525693_d3d9a06d79b87ec1aedc1dcea03ca929.jpg


                        

à suivre demain 

épisode 6 : Le Nain des Dents-la-Lune

 

 

Publié dans Feuilleton

Partager cet article
Repost0

<< < 1 2 3 4 > >>